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Plomb, échafaudages et perches à selfie : trois mois après l’incendie de Notre-Dame

Brouhaha de langues étrangères, guides enthousiastes, touristes et perches à selfie… Devant Notre-Dame de Paris, le joyeux tumulte de juillet est revenu. Mais les grilles empêchant l’accès au parvis, les hommes en combinaison blanche et l’étrange béance dans la toiture rappellent l’incendie dévastateur d’il y a trois mois.

Le ciel perce désormais entre les deux tours de la cathédrale, là où auparavant se dressait la flèche dessinée par Viollet-le-Duc, une vision qui émeut touristes et Parisiens venus contempler le monument blessé.

Ils ont le « coeur brisé », comme Juan Manuel, ce Vénézuelien qui a grandi avec « Le Bossu de Notre-Dame ». Elle « appartient à l’histoire du monde », estime une touriste australienne, attristée par la destruction partielle de l’édifice.

Malgré les échafaudages de fer qui la soutiennent, « elle a l’air merveilleuse. Je sais qu’il y a beaucoup de travail mais on a l’impression qu’elle va s’en sortir », se rassure Ryan Fitzpatrick, avocat américain en vacances.

Miguel Castillo, lui, a assisté à l’incendie. C’est sa chienne, Miss Chanel, qui l’a alerté en dressant les oreilles, raconte-t-il. Cet ancien pompier de Paris se rappelle « le halo de fumée qui (…) masquait le soleil » et passe désormais tous les jours devant Notre-Dame. Il se dit « choqué » des ravages subis par ce « patrimoine grandiose ».

Tous promettent de donner aux organismes qui collectent actuellement des fonds pour permettre la restauration et la conservation de l’édifice. Même si pour l’heure, seuls quelque 10% des 850 millions promis ont été versés. Un projet de loi encadrant les travaux et ces dons doit être définitivement adopté mardi au parlement.

– Moral plombé –

Derrière Miguel Castillo, des hommes en combinaison de protection blanche et portant un masque tirent des tuyaux, des ouvriers contraints de suivre un protocole précis (pédiluve, sas de décontamination, etc.) en raison d’une pollution au plomb consécutive à l’incendie et révélée par Mediapart.

La préfecture de police de Paris a assuré que ces retombées ne créaient pas de risques sanitaires en matière de qualité de l’air mais a souligné en revanche « la présence ponctuelle très importante » de poussières de plomb sur le parvis et la voirie, actuellement interdits au public.

Sceptiques, des élus de partis de gauche au Conseil de Paris ont exigé la semaine dernière une cartographie des taux de pollution de ce métal observés aux abords du monument.

Bouquiniste depuis vingt ans, Lucile Monbrun est « inquiète » pour sa santé depuis ces révélations, mais guère plus que par la pollution urbaine en règle générale. Elle pointe du doigt un manque de communication de la Ville de Paris : « Quand ils ont désamianté [les quais] il y a deux ans, on nous a dit qu’il n’y avait pas de risque mais il y avait des gens en combinaison et tout était bâché », souligne-t-elle.

D’autres sont résignés, comme Pascal Remy, qui n’a d’autre choix que de travailler à cet endroit. « Moins j’en sais, mieux je me porte, c’est comme Tchernobyl », explique, fataliste, le bouquiniste.

Un peu plus loin sur les quais, Michel Charles, qui tient également un stand, est incrédule. Il ne « sent rien du tout » et, ne voyant « pas de mesures [prises] à grande échelle », est confiant.

Mais outre le plomb, les commerçants situés vers Notre-Dame de Paris, qui accueillaient 13 millions de visiteurs annuels, font grise mine.

Lucile « ressent » la baisse de fréquentation de son stand depuis l’incendie. La fermeture temporaire du pont devant la cathédrale et la modification du circuit de certains bus touristiques sont en grande partie responsables, estime-t-elle.

Mais, dit la commerçante, « il y a aussi les +gilets jaunes+ », un autre incendie, social celui-ci, qui couve toujours.

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