in

Rugby: Sevu Reece, la sélection qui fait tache chez les All Blacks

Est-on sélectionnable quand on est coupable de violences conjugales ? La première cape annoncée de l’ailier d’origine fidjienne Sevu Reece samedi face à l’Argentine ébranle les All Blacks, placés sur un piédestal en Nouvelle-Zélande.

Un an après sa comparution pour violences sur sa compagne, la première apparition avec les All Blacks du nouvel ailier vedette des Crusaders ternit la sélection à la fougère argentée, selon les chroniqueurs sportifs du pays qui appellent à l’exemplarité.

« Nous passons l’éponge sur un comportement que nous n’accepterions normalement pas, seulement parce qu’il s’agit d’un joueur talentueux », charge ainsi l’éditorialiste de Radio New Zealand Hamish Bidwell.

Phénomène de la dernière saison de Super Rugby, l’ailier de 22 ans a empilé 15 essais qui ont compté dans le couronnement des Crusaders, la franchise de Christchurch où il a atterri après son licenciement par la province irlandaise du Connacht, conséquence de ses actes.

Le Fidjien, arrivé en Nouvelle-Zélande à 17 ans, avait plaidé coupable et dû payer une amende, mais a échappé à une condamnation, son avocat ayant fait valoir que cela pourrait mettre un terme à sa carrière sportive.

« Reece, à mon avis, devait purger une peine plus longue en matière de rugby que ce qui s’est passé, » estime le journaliste Chris Rattue dans les colonnes du New Zealand Herald, épinglant une « hâte indécente ».

– Hansen dans l’embarras –

D’autant que, dans la foulée de cette première apparition face à l’Argentine, il pourrait se faire une place dans le groupe pour la Coupe du monde au Japon à l’automne.

« Compte tenu de la vénération portée aux All Blacks, et de la façon dont les joueurs de l’équipe sont considérés comme des modèles, ce serait une bonne chose que le comité de sélection inclue le civisme dans ses critères », juge Janet Fanslow, spécialiste des violences conjugales pour l’université d’Auckland, contactée par l’AFP.

« De meilleurs hommes font de meilleurs All Blacks », tel est le mantra développé depuis l’époque de l’ancien sélectionneur Graham Henry. Une façon d’exiger le maximum des joueurs portant l’étoffe noire, sur les terrains comme en dehors, où ils restent la vitrine des kiwis.

Or, l’actuel entraîneur en chef Steve Hansen, interrogé sur la présence du sulfureux ailier, a paru minimiser le caractère masculin des violences domestiques. « Je sais qu’il n’y a pas seulement des hommes qui frappent des femmes mais aussi des femmes qui agressent des hommes », a-t-il déclaré, arguant de sa condition d’ancien fonctionnaire de police.

Pris par un feu nourri de critiques, le sélectionneur des doubles champions du monde en titre a été contraint de rétro-pédaler, reconnaissant que « l’immense majorité des victimes de violences domestiques sont des femmes et des enfants ».

– Le précédent Filipo –

Contacté par l’AFP, le ministre de la Justice Andrew Little a rappelé le devoir d’exemplarité des joueurs sélectionnés. « Les All Blacks ne sont pas que de bons joueurs, ils sont également des modèles et il appartient à la Fédération de décider si ceux choisis pour porter le maillot noir répondent ou non aux attentes des Néo-Zélandais », a-t-il déclaré.

L’affaire n’est pas le premier dossier gênant pour la Fédération néo-zélandaise, loin de là. En 2016, le demi de mêlée Aaron Smith avait été épinglé sortant des toilettes d’un aéroport en compagnie d’une femme et des joueurs des Chiefs avaient été accusés d’agression sexuelle par une strip-teaseuse.

Mais le cas Reece rappelle surtout celui de Losi Filipo, un jeune espoir qui avait la même année bénéficié d’un non-lieu malgré l’agression dans la rue de quatre personnes, dont deux femmes, le juge considérant là aussi qu’une condamnation nuirait fortement à sa carrière.

Après avoir suivi un programme de réhabilitation, Filipo a été sélectionné début 2019 pour une équipe nationale à VII. « Il a montré des remords, fait preuve d’engagement et de détermination pour changer de manière positive et le rugby continue de jouer un rôle important dans sa vie », avait estimé Nicki Nicol, responsable du programme Respect et Inclusion mis en place par la Fédération.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

GIPHY App Key not set. Please check settings

    Ebola en RDC: état d’urgence mondial, le jour d’après

    Tour de France: les favoris, la tête au chrono, attendent