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Attaques en Arabie: l’alliance controversée de Trump avec Ryad au coeur des choix américains

La riposte américaine aux attaques contre des installations pétrolières saoudiennes sera scrutée à la lumière de l’alliance controversée qu’entretient, envers et contre tout, Donald Trump avec Ryad et son prince héritier Mohammed ben Salmane.

Le président des Etats-Unis a dépêché mardi son secrétaire d’Etat Mike Pompeo en Arabie saoudite pour évoquer la « réponse » à apporter à ce que Washington estime être une « attaque sans précédent » imputée, plus ou moins directement, à l’Iran.

Mais le premier tweet du milliardaire républicain a pu donner l’impression que l’Amérique s’en remettait au royaume saoudien pour formuler sa propre stratégie.

« Nous attendons que le royaume nous dise qui il estime être le coupable de cette attaque, et sous quelle forme nous devrons agir! », a ainsi lancé dimanche Donald Trump. Et ce alors même que Mike Pompeo avait déjà clairement accusé Téhéran, et que les services de renseignement américains sont en première ligne pour déterminer les auteurs des tirs.

Les critiques ne se sont pas fait attendre, surtout côté démocrate.

« Trump attend les instructions de ses maîtres saoudiens », a ironisé Tulsi Gabbard, une petite candidate aux primaires pour la Maison Blanche, estimant que l’ex-homme d’affaires se comportait en « caniche de l’Arabie saoudite ».

« Si le président Trump veut riposter militairement aux attaques », « il doit démontrer devant le Congrès et le peuple américain qu’une réponse militaire est nécessaire et justifiée », a aussi plaidé le sénateur Chris Coons, soulignant que les deux pays ne sont pas liés par un traité d’assistance mutuelle.

Le locataire de la Maison Blanche a depuis quelque peu atténué son propos en assurant lundi que son gouvernement consultait tous ses alliés, qu’il n’avait « pas promis aux Saoudiens » de les protéger et que ces derniers participeraient financièrement à toute action qui serait décidée.

– « Une question d’argent » –

Pour Yasmine Farouk, chercheuse au cercle de réflexion Carnegie Endowment for International Peace, Donald Trump fait mine de « s’en remettre aux Saoudiens » pour ne pas porter seul la paternité de la risposte.

« Cela permet de rendre service aux Saoudiens, qui n’ont pas envie d’une guerre », dit-elle à l’AFP. Mais aussi « de ne pas passer pour un président faible si, in fine, il n’y a pas d’action militaire ».

Le président septuagénaire, qui aime afficher une image de fermeté et multiplier les menaces tonitruantes à l’encontre des ennemis des Etats-Unis, est aussi celui qui a promis de désengager l’Amérique des interventions extérieures jugées trop coûteuses. Sans compter que ces attaques interviennent au moment où il espérait organiser un tête-à-tête avec le président iranien Hassan Rohani.

En consultant Ryad, Donald Trump, en campagne pour sa réélection, semble donc aussi vouloir gagner du temps.

Mais cela agace à Washington, où l’on estime que l’attaque visant l’approvisionnement énergétique mondial dépasse, et de loin, les simples intérêts saoudiens, et qu’il en va de la crédibilité des Etats-Unis.

L’Arabie saoudite est de longue date un allié stratégique des Etats-Unis au Moyen-Orient. Mais Donald Trump en a fait le pilier incontournable de sa politique régionale toute tournée contre l’Iran chiite, bête noire de Washington et ennemi numéro un du royaume sunnite.

Or depuis un an, cette relation a traversé de fortes bourrasques qui l’ont affaiblie aux yeux d’une grande partie des élus américains, qu’ils soient démocrates ou républicains. En cause, le rôle du prince héritier saoudien, interlocuteur privilégié de l’administration Trump.

Le Sénat américain a ainsi jugé à l’unanimité que Mohammed ben Salmane, surnommé MBS, était « responsable » de l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, tué en octobre 2018 dans le consulat de son pays à Istanbul. Mais le président américain n’en a pas tenu compte.

Il a ensuite opposé un double veto, coup sur coup, à des résolutions du Congrès contre le soutien américain aux opérations militaires dirigées par l’Arabie saoudite au Yémen, et contre de nouvelles ventes d’armes à Ryad.

« Trump depuis qu’il est au pouvoir privilégie systématiquement sa relation personnelle avec MBS dans tous les domaines, quitte à neutraliser le Congrès, qu’il s’agisse de Khashoggi, du Yémen ou des ventes d’armes », explique Yasmine Farouk. « Il soutient MBS envers et contre tout… tant que l’Arabie saoudite paie, car pour Trump, il ne s’en cache pas, c’est avant tout une question d’argent. »

De fait, le président américain a encore vanté lundi un « grand allié » qui « paye comptant » et « a dépensé 400 milliards de dollars » aux Etats-Unis « au cours des dernières années ».

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