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Colombie: importantes manifestations et grève contre le gouvernement conservateur

Des dizaines de milliers de Colombiens sont descendus dans la rue pour protester contre la politique du président de droite Ivan Duque, très impopulaire, confronté jeudi aux manifestations les plus massives de ces dernières années.

A la grève nationale et aux marches convoquées par des syndicats de travailleurs se sont joints les étudiants, les indigènes, mais aussi des organisations de défense de l’environnement et de l’opposition, pour protester contre les politiques économiques, sociales et sécuritaires du gouvernement, au pouvoir depuis moins de 18 mois.

« Il y a une accumulation de situations que nous espérons voir révisées après cette journée, y compris par un grand dialogue national de concertation », a déclaré à l’AFP Roberto Gomez, président de la Confédération générale du travail.

La mobilisation intervient dans un climat agité en Amérique latine, suite aux crises socio-politiques, sans dénominateur commun, déclenchées récemment en Equateur, puis au Chili et en Bolivie.

A la mi-journée, les autorités faisaient état d’une certaine « tranquillité », troublée par des affrontements « isolés » à Bogota et à Cali (ouest), ainsi que par le blocage des transports urbains et d’avenues de différentes villes du pays.

– Président et ministres réunis –

Sous une pluie battante, des milliers d’étudiants marchaient vers l’aéroport international de Bogota lorsque la police anti-émeute leur a lancé des grenades assourdissantes pour les disperser, a constaté un journaliste de l’AFP.

Pendant ce temps, le chef de l’Etat présidait un poste de commandement unifié, réunissant les responsables de l’armée, de la police, ainsi que les ministres de la Défense et de l’Intérieur.

Des militaires ont été déployés dans la capitale pour protéger des « installations stratégiques », ainsi que dans d’autres localités.

Cela a suscité la « préoccupation » du bureau colombien de la Haute commissaire des Nations unies pour les droits humains. « Les Etats doivent limiter et conditionner au maximum l’usage des forces militaires pour le contrôle de troubles internes », a-t-il indiqué dans un communiqué.

Alors que de nombreux commerces, entreprises, universités et établissements scolaires étaient fermés, plusieurs cortèges convergeaient vers la place Bolivar, coeur historique de Bogota, proche de la présidence et où se trouve le parlement.

Dans l’un d’entre eux, des dizaines d’indigènes défilaient au côté de leur leader Luis Fernando Arias: « Nous espérons que la violence cesse dans nos territoires (…) que la paix soit mise en oeuvre et qu’on arrête de nous tuer ».

« Nous sommes en faveur de la marche car, en Colombie, nous sommes fatigués de la corruption, de l’impunité, que le gouvernement ne fasse rien pour les pauvres », a expliqué à l’AFP Olga Cañon, femme au foyer de 55 ans.

Outre une politique de sécurité focalisée sur la lutte anti-drogue, le mouvement dénonce des velléités du gouvernement de flexibiliser le marché du travail, d’affaiblir le fonds public des retraites en faveur d’entités privées, et de reculer l’âge de la retraite.

Les étudiants réclament en outre des moyens pour l’enseignement public, et les indigènes des mesures de protection suite à l’assassinat de 134 d’entre eux depuis l’arrivée d’Ivan Duque au pouvoir en août 2018.

« On a très peur de défiler dans les rues, mais nous le faisons quand même car une grande part de cette peur est diffusée par l’Etat avec la militarisation, la fermeture des frontières », a déclaré à l’AFP Valentina Gaitan, 21 ans, étudiante en Sciences politiques.

– Garantir l’ordre public –

Le président Duque a admis, mercredi dans une allocution télévisée, la légitimité de certaines revendications, mais déploré une campagne de « mensonges » cherchant à susciter des violences. « Nous reconnaissons la valeur de la protestation pacifique, mais garantissons aussi l’ordre », a-t-il averti.

Les frontières avec le Brésil, l’Equateur, le Pérou et le Venezuela ont été fermées jusqu’à vendredi pour éviter une altération de « l’ordre public et de la sécurité ».

La police a arrêté deux personnes, accusées de violences lors de précédentes manifestations, et effectué une trentaine de perquisitions, y compris dans les locaux de médias indépendants.

La mobilisation a été convoquée le mois dernier dans une ambiance d’insatisfaction envers le gouvernement de M. Duque, qui n’a pas pu consolider de majorité au parlement et dont le parti, le Centre démocratique (CD), a subi de sérieux revers lors des élections locales d’octobre.

Des secteurs de l’opposition se sont joints au mouvement, dont la Force alternative révolutionnaire commune (Farc). Le parti créé par l’ex-guérilla déplore l’assassinat de plus de 170 anciens rebelles depuis l’accord de paix du 24 novembre 2016, auquel M. Duque est opposé, le jugeant trop laxiste.

Selon l’analyste Jason Marczak, du centre de recherches Atlantic Council à Washington, la mobilisation contre le gouvernement, cible de plusieurs manifestations ces derniers mois, est une « démonstration considérable du mécontentement dans la région ».

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