Des députés LREM « en colère », y compris contre Emmanuel Macron, une ministre qui prend « cher » et un chef de gouvernement qui « assume » sa responsabilité: la majorité a tenté mardi de dénouer la crise autour du congé de deuil d’un enfant qui sème la zizanie au sein de la macronie.
Le rejet jeudi à l’Assemblée d’une proposition UDI-Agir qui visait à porter de cinq à douze jours ce congé, n’en finit pas de jeter le trouble. Sur « ce sujet devenu une espèce de boule de feu », « probablement, sûrement, une part de responsabilité vient du gouvernement. Je l’assume », a déclaré Edouard Philippe lors d’une réunion du groupe majoritaire tendue, selon des propos rapportés.
Le chef du gouvernement a résolument pris la défense de la ministre du Travail Muriel Pénicaud, au centre des critiques: « Tous ceux qui iront chercher la responsabilité ailleurs, sur Muriel, en interne ou en externe, je leur dis merde ! ».
« Nous n’avons pas su collectivement expliquer notre position, ni nous adapter. Les critiques nous font très mal », a encore reconnu le Premier ministre, venu éteindre le feu chez les « marcheurs ».
Car l’épisode a laissé des traces au sein de la majorité, déjà secouée par une succession de crises, des « gilets jaunes » aux grèves contre la réforme des retraites, certains souffrant de passer pour de simples « godillots ».
Des élus présents lors du vote litigieux jeudi ont ainsi refusé qu’on dise « qu’ils ont voté par loyauté » et rejeté l’idée d’une « erreur », estimant que le texte était « mal ficelé » et plaidant pour « aller plus loin » que ce que proposait l’UDI-Agir.
Certains ont dit leur « colère » et leur impression « d’avoir été envoyés au front et lâchés ». Pour un député, l' »emballement médiatique » a été créé par Emmanuel Macron lui-même, par son intervention samedi dans ce dossier, où le chef de l’Etat a demandé de « l’humanité ».
« Ça me touche dans mon honneur », a déploré une députée, la voix tremblante.
Des propos attribués dans la presse à un ténor de la majorité, traitant les « marcheurs » de « cons », ont aussi fait des remous, Aurore Bergé estimant notamment que leur « seule connerie a été d’être loyal ».
« Nous ne sommes ni des +cons+ ni des inhumains », a renchéri une « marcheuse » à l’AFP en marge de la réunion, voyant dans la ministre du Travail un « fusible ».
– « Députés droïdes » –
Muriel Pénicaud a aussi critiqué devant les députés un texte centriste « mal ficelé », et souligné que depuis jeudi, « on est nombreux à prendre cher ».
Pour la première vice-présidente du groupe Marie Lebec, qui n’a « pas du tout aimé cette expression d’erreur collective », il s’agit d’une « erreur de management du gouvernement et du groupe ».
Lors de ce moment vécu comme « cathartique », plusieurs responsables ont mis en avant la nécessité de « sortir vite » de cette crise. Evoquant un « épisode douloureux », le président de l’Assemblée Richard Ferrand a aussi plaidé pour « se serrer les coudes ».
C’est sous l’angle d’une majorité dominée par les « technos » que les oppositions de droite comme de gauche poursuivaient leurs attaques mardi. Adrien Quatennens (LFI) a fustigé des macronistes faisant « l’effet d’un droïde doté d’un fichier Excel à la place du cerveau et d’une calculatrice à la place du coeur ».
Lors des questions au gouvernement, les accusations de « faute morale » et « d’indécence » sont revenues dans la bouche de Pierre Cordier (apparenté LR).
« Pour être un de ceux qui a vécu » un tel drame de perte d’un enfant, le « marcheur » Bruno Bonnell a récusé en retour appartenir à une « majorité cynique et bornée », sous les applaudissements de ses collègues.
Le Premier ministre a lui parlé avec l' »humilité d’un père de trois enfants dont la seule véritable angoisse est d’en perdre un », jugeant qu’il faut « probablement » étendre le congé, mais qu’aucun délai ne sera « à la hauteur » de la douleur vécue. Il a plaidé pour une vaste amélioration du « dispositif ».
« Nous pouvons réussir » sur ce sujet, a aussi affirmé Muriel Pénicaud, rappelant que le gouvernement allait mener une concertation et travailler à une nouvelle rédaction d’ici l’examen du texte au Sénat le 3 mars.
« On a peut-être tous les défauts de la terre, mais on sait réagir », a fait valoir devant la presse le patron des « marcheurs » Gilles Le Gendre.
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