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Au procès Fillon, ultime charge de la défense contre une enquête « brûlot »

« Un roman », une enquête « à charge »: au dernier jour du procès à Paris de l’ancien Premier ministre François Fillon et de sa femme Penelope, la défense s’est évertuée mercredi à démonter les soupçons d’emplois fictifs de Mme Fillon et à livrer sa « vérité ».

Les six avocats du couple Fillon et de Marc Joulaud, ancien suppléant de François Fillon à l’Assemblée nationale, ont plaidé la relaxe générale, au lendemain d’un féroce réquisitoire. Le parquet national financier (PNF) a demandé cinq ans de prison, dont deux ferme, et 375.000 euros d’amende contre un François Fillon « cynique », appâté par le « gain ».

Le tribunal correctionnel rendra son jugement le 29 juin.

Offensif, l’avocat de l’ex-candidat de la droite à la présidentielle, Antonin Lévy, s’est élevé contre un « brûlot », une « enquête folle » ouverte en janvier 2017 en pleine campagne présidentielle, après un article du Canard enchaîné.

« Onze perquisitions », dont « une double » à l’Assemblée nationale, « 44 personnes entendues », a rappelé l’avocat. Citant nommément chacune d’elles, il a ridiculisé certains des témoignages, balayé les autres jugés « pas pertinents » pour dire si l’emploi de Mme Fillon comme collaboratrice parlementaire était ou non fictif.

Pourquoi n’avoir « pas donné suite » aux témoignages plus favorables ? interroge Me Lévy. Car « pour pouvoir être entendu, et vite, il faut dire que Penelope Fillon n’a pas travaillé », a-t-il taclé.

Ces « choix » ont, selon l’avocat, « contraint » la défense à « un stratagème »: verser aux débats, et non lors de l’enquête, plusieurs dizaines de témoignages surprise censés attester de la réalité du travail de Penelope Fillon.

Pour ses emplois d’assistante parlementaire, Mme Fillon a perçu 613.000 euros nets d’argent public entre 1998 et 2013.

Presque aucune trace des missions dont elle se prévaut n’a été retrouvée, preuve de leur « fictivité » pour l’accusation, qui a requis trois ans de prison avec sursis et 375.000 euros d’amende contre l’épouse de l’ancien Premier ministre.

– « Les yeux et les oreilles » –

« On a beaucoup glosé sur l’oralité du travail de Penelope Fillon et l’absence des traces », a souligné Antonin Lévy. Mais d’autres collaborateurs de François Fillon n’ont « rien conservé », « sans qu’on considère qu’ils avaient un emploi fictif ».

Le rôle de collaboratrice parlementaire de Mme Fillon n’était connue que d’un petit cercle ? Mais « neuf personnes, neuf » connaissaient cette qualité, dont les aînés du couple, a pointé Me Lévy, tentant de démolir un à un les éléments à charge de l’accusation.

Il a également demandé au tribunal de « prendre en compte » la séparation des pouvoirs, souvent brandie par François Fillon, selon laquelle le juge ne peut pas interférer dans les tâches confiées par un parlementaire à ses collaborateurs.

Mme Fillon était « les yeux et les oreilles de son mari », entretenait le lien entre le député et les « électeurs des cantons ruraux », a assuré l’un de ses avocats, Pierre Cornut-Gentille.

« Tout homme politique important aime avoir auprès de lui quelqu’un qui ne fait pas carrière », a-t-il ajouté, vilipendant par ailleurs la « violence inouïe » de l’accusation, qui a présenté Mme Fillon comme la « victime consentante » des agissements de son mari.

Le PNF a en outre requis deux ans avec sursis et 20.000 euros d’amende à l’encontre de Marc Joulaud, maire de Sablé-sur-Sarthe et candidat à sa réélection, qui avait salarié Mme Fillon à la demande de son époux.

M. Joulaud « a totalement respecté la loi », a plaidé son avocat Jean Veil. A ses débuts, « il avait tout simplement besoin de Penelope Fillon pour être député », a insisté sa consoeur Léonor Hennerick.

Dans la matinée, la défense avait plaidé la prescription des délits reprochés, celui de détournement de fonds publics comme l’emploi de Mme Fillon à la Revue des deux mondes du milliardaire Marc Ladreit de Lacharrière.

Aux yeux de la défense, les contrats de Penelope Fillon n’étaient pas « dissimulés » puisqu’ils étaient dûment déclarés. Dès lors, le délai de prescription de trois ans commence à courir au moment de ces contrats, pas de la révélation de l’affaire par le Canard enchaîné, donc les poursuites étaient trop tardives.

L’affaire avait atomisé la campagne présidentielle de François Fillon, alors donné favori.

« J’ai souvent entendu dire que vous ne pourriez que condamner parce que si vous ne condamniez pas, cela voudrait dire que l’élection aurait été confisquée au peuple français. Il n’y a aucune raison de vous faire cette injure », a lancé au tribunal Me Antonin Lévy.

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