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La loi prostitution souffre dans son application d’un manque de volonté politique, selon un rapport

Plus de quatre ans après son adoption, la loi prostitution qui affirmait la volonté abolitionniste de la France souffre d’un manque de moyens, de mise en oeuvre, et surtout de volonté politique, cinglent dans un rapport les inspections générales de trois ministères.

Si cette loi, qui instaure notamment la pénalisation des clients, « a réaffirmé l’engagement abolitionniste de la France, elle n’a pas déployé suffisamment de moyens pour atteindre cet objectif », écrivent les inspections générales des ministères de l’Intérieur, de la Justice et de la Santé dans ce rapport mis en ligne lundi soir, portant sur une étude réalisée fin 2019.

Première coupable, notent les auteurs, « l’absence de portage politique et d’engagement volontariste des pouvoirs publics ».

Adoptée le 13 avril 2016, la loi a notamment abrogé le délit de racolage, remplacé par la verbalisation des clients – avec une amende de 1.500 euros pouvant aller jusqu’à 3.750 euros en cas de récidive -, parfois complétée par un stage de sensibilisation.

Mais cette « infraction de recours à l’achat d’acte sexuel » est « peu constatée, avec 1.939 personnes mises en cause en 2018 seulement », écrivent les inspecteurs, « concentrées sur un petit nombre de territoires », et notamment 50% à Paris et en région parisienne.

Un chiffre que tient cependant à saluer Grégoire Théry, secrétaire général du Mouvement du Nid, qui y voit un succès de la loi, et se félicite globalement de ce rapport, une « piqûre de rappel » salutaire, « pour dire qu’une loi de cette ampleur » a peut-être besoin d’un « délégué interministériel à la mise en oeuvre de ce texte, ou à la prostitution ».

– Sortie –

Plusieurs mesures instaurées en 2016 sont néanmoins peu ou pas mises en oeuvre.

Ainsi des parcours de sortie de la prostitution, « qui ne concernent encore qu’un nombre limité de personnes au regard du public potentiel », souligne le rapport, selon lequel « environ 230 personnes » en bénéficiaient fin juin 2019.

De l’avis des inspecteurs, fondé sur des entretiens avec des associations et préfets, ces parcours « restent peu connus en dépit de la promotion assurée par les associations ».

La complexité des dossiers à monter et les conditions pour bénéficier de ce dispositif – notamment la rupture totale avec la prostitution pour des personnes dans des situations très précaires – expliquent en partie le faible nombre de bénéficiaires.

Autre mesure phare, les stages de sensibilisation à l’intention des clients « sont peu développés » – la « part des stages proposés comme alternative aux poursuites a été de 8% du total des réponses pénales », note le rapport.

Les inspecteurs soulignent les effets positifs de ces stages – notamment lorsqu’ils intègrent le témoignage « d’une personne s’étant livrée à la prostitution », mais appellent à une homogénéisation de leurs contenus, durée et coûts, sous la houlette des chefs des cours d’appel.

Enfin, « le dispositif de protection spéciale pour les victimes de traite ou de proxénétisme en danger sur le territoire français créé par la loi n’a jamais été utilisé », en raison notamment de son coût, selon M. Théry.

En ce qui concerne les finances, le mouvement du Nid se félicite par ailleurs que la loi ait permis de réattribuer 2,35 millions d’euros de fonds saisis à des proxénètes, à l’accompagnement des personnes prostituées.

Parmi les 28 recommandations, les inspecteurs conseillent la réunion du comité de suivi interministériel, qui ne s’est pas réuni depuis juin 2017. Cette « mise en sommeil », écrivent les inspecteurs, a retardé « l’application de la loi dans toutes ses composantes ».

Ils demandent aussi l’organisation de campagnes gouvernementales d’information sur la prostitution, ainsi que la garantie pour les associations de moyens pérennes.

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