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Dupond-Moretti promet réforme et dialogue à « toute la famille judiciaire »

Face aux critiques du principal syndicat de magistrats, l’ex-avocat et nouveau garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti a tendu la main mardi à « toute la famille judiciaire », promettant de « dialoguer » et de mener à son terme la réforme « tant attendue » du parquet.

L’annonce de la nomination de ce tonitruant pénaliste, pas toujours avare d’attaques envers les juges, a sidéré de nombreux magistrats et fait sortir de ses gonds le syndicat majoritaire dans la magistrature, l’USM, qui y a vu une « déclaration de guerre ».

Le ministère de la Justice « n’est pas le ministère de la guerre, même si j’ai cru entendre ces mots, mais celui des libertés », a rétorqué mardi Eric Dupond-Moretti, après avoir reçu les « sceaux » des mains de son prédécesseur Nicole Belloubet.

« Je ne fais de guerre à personne », a assuré le ministre.

Moins de deux semaines plus tôt, celui qui était encore avocat, et l’un des plus célèbres de France, s’était emporté contre le Parquet national financier et ses « méthodes de barbouzes ». L’hebdomadaire Le Point venait de révéler que le PNF avait pendant près de six ans tenté d’identifier la « taupe » ayant pu informer Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog – un ami d’Eric Dupond-Moretti – qu’ils étaient sur écoute dans une affaire de corruption.

Les enquêteurs avaient un temps épluché les factures téléphoniques détaillées (« fadettes ») de nombreux ténors du barreau et de leurs collaborateurs, parmi lesquels Me Dupond-Moretti qui avait alors annoncé le dépôt d’une plainte pour « violation de l’intimité de la vie privée et du secret des correspondances » et « abus d’autorité ».

Cette plainte a été retirée dès lundi soir, selon l’entourage du président de la République.

Fin juin encore, avant que le poste de garde des Sceaux ne lui soit proposé, il promettait sur LCI de faire « le ménage » dans la magistrature « de façon très très très claire » et de mettre en place « un système de responsabilité des juges ».

En 2018, il réclamait la suppression de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) et reprochait aux magistrats d’être « encastés (à l’ENM) dans un moule dont ils ne sortiront jamais ».

– « Des actes » –

Des propos que de nombreux magistrats n’ont pas digérés et qui contrastent avec son discours d’investiture.

Dans la cour de la Chancellerie, le nouveau ministre a salué ces « très grands magistrats devant qui (il a) eu l’honneur de plaider ». Il a aussi évoqué « les conditions de travail déplorables dans lesquelles se débattent quotidiennement magistrats et greffiers ».

Dans « un message bienveillant à toute la famille judiciaire », il promet « dialogue » et acceptation de la « contradiction », dont il a « toujours été le fervent défenseur ». Mais dit vouloir « garder le meilleur et changer le pire » de la magistrature.

Réconcilier la « famille judiciaire » est l’un des principaux défis d’Eric Dupond-Moretti, tant l’unité affichée contre la vaste réforme de la justice de Nicole Belloubet semble loin.

Les révélations sur les investigations du PNF ciblant des ténors du barreau ont ravivé les tensions, déjà exacerbées par la grève dure des avocats contre la réforme des retraites et par deux mois de confinement.

Et elles ont relancé le débat sur l’indépendance de la justice.

Eric Dupond-Moretti en a fait sa priorité, en déclarant vouloir « être le garde des Sceaux qui portera enfin la réforme du parquet ». Maintes fois promise, cette réforme prévoit que les magistrats du parquet soient nommés sur avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), comme les magistrats du siège.

« C’est essentiellement ce sur quoi on l’attend », a réagi auprès de l’AFP Céline Parisot, présidente de l’USM (Union syndicale des magistrats), « toujours désabusée » et « dubitative » après la nomination d’Eric Dupond-Moretti.

« Il tend la main, il ne pouvait pas faire autrement », a-t-elle ajouté. « Si dans les deux ans, il aboutit à une réforme du parquet, ce serait déjà une petite révolution », a constaté la magistrate qui souhaite que le ministre passe « de la parole aux actes ».

« On a noté une volonté de parler aux magistrats. Mais Eric Dupond-Moretti n’est pas notre maîtresse d’école. Il a eu des mots très forts, on attend que ça se transforme en actes », a souligné Lucille Rouet, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche).

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