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La majorité confrontée au « sparadrap » de l’affaire Darmanin

Plus de 15 jours après sa nomination place Beauvau, Gérald Darmanin doit faire face à une polémique autour d’une accusation de viol qui, loin de s’étioler, le fragilise et oblige gouvernement et majorité à le soutenir en bloc, parfois de manière embarrassée.

« Ce qui est ennuyeux, c’est que cette histoire va feuilletonner », soupire un membre du gouvernement, alors que le nouveau ministre de l’Intérieur est confronté lors de chacun de ses déplacements à une cohorte de manifestants.

M. Darmanin fait l’objet depuis 2017 d’une plainte d’une femme qui l’avait sollicité en 2009 pour tenter de faire annuler une condamnation. Selon la plaignante, M. Darmanin lui aurait fait miroiter son appui et elle se serait sentie contrainte de « passer à la casserole ». Pour M. Darmanin, il s’agissait au contraire d’une relation librement consentie.

Classée sans suite dans un premier temps, la procédure a été relancée par la cour d’appel de Paris qui a demandé début juin de nouvelles investigations. Ce qui n’a pas inquiété outre mesure l’exécutif, puisque celui qui revendique avoir eu autrefois une « vie de jeune homme » – il a aujourd’hui 37 ans – a été promu, dans la foulée, des Comptes publics à l’Intérieur.

Dans les couloirs de Beauvau, cette nomination a pourtant provoqué des haussements de sourcils: si Gérald Darmanin devait être entendu dans cette affaire, ce serait par des policiers dont il est le supérieur hiérarchique. « Le tout sous l’autorité d’un juge », rétorque l’entourage du ministre, qui conteste un éventuel conflit d’intérêts, alors que ses avocats ont prévenu que le ministre se réservait désormais le droit de poursuivre « tout propos diffamatoire entachant son honneur et sa considération ».

L’affaire a déjà fait l’objet de deux classements sans suite et un non-lieu rendu par un juge d’instruction, ne cesse en outre de répéter le Premier ministre Jean Castex. C’est dire si l’affaire est promise à « évoluer dans le bon sens », s’est même aventuré l’entourage d’Emmanuel Macron.

Ce même argument, utilisé l’an dernier pour justifier la proposition de nomination à la Commission européenne de Sylvie Goulard – à l’époque visée par une simple enquête – s’était retourné contre l’exécutif lorsqu’elle avait été mise en examen trois mois plus tard.

– Une « fragilité » –

Prise de court par une polémique à l’ampleur inattendue, depuis relayée par plusieurs responsables politiques de l’opposition, la majorité se veut unanime derrière le principe de la présomption d’innocence, « qui a valeur constitutionnelle », a encore rappelé mardi sur RTL le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal.

À Beauvau, d’aucuns constatent pourtant que la polémique « ne retombe pas » et craignent que l’affaire ne se transforme en « sparadrap qui reste collé » au ministre.

Aucun responsable de la majorité ou membre du gouvernement n’échappe depuis 15 jours aux interpellations sur le sujet, désormais partagés entre embarras et agacement.

« Je me suis exprimée 47 fois sur le sujet, je ne vais pas remettre de thune dans le juke-box », a eu pour seule réponse Marlène Schiappa, mardi matin, sur Europe 1.

Par ailleurs, la stratégie de défense des amis de Gérald Darmanin interroge: la ministre déléguée à l’Égalité femmes-hommes, Elisabeth Moreno, s’est dite convaincue par la bonne foi de son collègue après avoir eu « une conversation de femme à homme », quand le président Macron avait rapporté avoir « une relation de confiance d’homme à homme ».

Lundi, quelque 200 élus, pour la plupart proches du ministre, lui ont apporté leur « soutien » dans une tribune, dont Xavier Bertrand, alors que le patron des députés LR, Damien Abad, a aussi pris la défense du ministre et s’est ému auprès de l’AFP de toute « condamnation médiatique ».

« Pas très sûr qu’on évalue bien les dégâts que cette affaire est en train de produire », a commenté le professeur de communication politique à Sciences Po, Philippe Moreau-Chevrolet.

Car, sans se prononcer sur le fond du dossier judiciaire, une source au ministère de l’Intérieur fait valoir que le comportement qui est rapporté fait apparaître un rapport aux femmes qui est une « fragilité » préjudiciable pour un premier flic de France.

« Sur le terrain judiciaire, je pense que cette affaire égale zéro. Après, c’est le terrain moral: est-ce que Darmanin a toujours été élégant avec les femmes ? », abonde, faussement interrogatif, un ministre. Avant d’estimer que « si tous les mecs qui se sont mal comportés avec les filles ne peuvent plus accéder à des responsabilités, on va avoir un problème ».

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