Après une dernière pinte au pub ou une coupe chez le coiffeur, les 56 millions d’habitants de l’Angleterre se sont reconfinés jeudi pour un mois dans l’espoir d’enrayer la deuxième vague de nouveau coronavirus, malgré les inquiétudes pour une économie déjà très fragilisée.
« C’est choquant et vraiment très triste », témoigne Maria Belkihel, 42 ans, venue chercher un colis dans un magasin d’Oxford Circus, dans le centre de Londres. « Hier, c’était plein mais (…) c’est complètement mort maintenant ».
De nombreux fêtards sont descendus mercredi soir dans les rues de Londres ou d’autres villes comme Leeds après la fermeture des bars, avant qu’ils ne gardent portes closes pour quatre semaines comme les autres commerces non essentiels. D’autres en ont profité pour faire des courses de dernière minute, avec de longues queues devant les magasins, ou pour quitter la capitale, coincés dans des embouteillages.
Après avoir résisté pendant des semaines à un confinement général, le Premier ministre conservateur Boris Johnson s’est résolu à cette option, le virus se répandant plus rapidement que dans les pires scénarios envisagés par ses conseillers scientifiques, faisant craindre que les hôpitaux soient rapidement débordés.
Le Royaume-Uni, pays le plus endeuillé d’Europe avec près de 48.000 morts de personnes testées positives au virus, dont 492 enregistrées mercredi, et plus d’un million de cas recensés, s’était confiné entièrement fin mars dernier, lors de la première vague du virus.
– « Cauchemar » –
Mais cette mesure suscite de vives inquiétudes pour l’économie, déjà mise à genoux par la première vague, surtout à l’approche de la période faste de Noël.
« On va payer ça pendant des années. Cette fermeture nous coûtera des milliers (de livres) supplémentaires, sur des milliers déjà engagés », a déploré auprès de l’AFP Joe Curran, propriétaire du pub The Queen’s Head, dans le quartier londonien de Soho.
La fédération britannique des commerçants, le BRC (British Retail Consortium) évoque « un cauchemar ».
Pour en amortir les effets, le gouvernement a annoncé jeudi l’extension jusqu’en mars du système d’indemnisation du chômage partiel. La Banque d’Angleterre, qui se montre plus pessimiste sur ses prévisions de croissance en 2020 et 2021, a musclé son programme de rachat d’actifs pour doper l’économie en mettant 150 milliards de livres sterling de plus sur la table.
Cherchant à apaiser les inquiétudes, Boris Johnson a promis que ce deuxième confinement se terminerait le 2 décembre, à condition que « chacun d’entre nous y mette du sien pour faire baisser (le taux de reproduction du virus) ».
Mais l’hypothèse d’une extension n’est pas définitivement écartée, a souligné le ministre de la Justice, Robert Buckland, sur la chaîne Sky News. « Nous ne pouvons rien exclure dans cette crise », a-t-il souligné, précisant toutefois que toute extension nécessiterait un nouveau vote au Parlement.
Le reconfinement, annoncé samedi par Boris Johnson, a été approuvé par une large majorité des députés mercredi, malgré l’opposition d’une trentaine de conservateurs de son camp, inquiets des répercussions économiques. Certains d’entre eux ont d’ores et déjà prévenu que la rébellion pourrait s’amplifier en cas d’extension.
– Ecoles ouvertes –
Contrairement au premier confinement, les écoles et universités restent ouvertes. Mais les cafés, pubs, restaurants et commerces non essentiels doivent fermer sauf s’ils proposent de la vente à emporter.
Les habitants sont priés de travailler de chez eux et ne doivent quitter leur domicile que pour des raisons précises comme faire de l’exercice, se rendre à un rendez-vous médical ou faire des courses alimentaires.
« Est-ce que je serai plus tenté d’aller voir mes amis? Probablement oui, pour être honnête. Mais pour ce qui est de faire des choses, il n’y aura rien à faire de toute façon, alors je vais m’y conformer », indique le retraité Andrew Revons, interrogé à Londres par l’AFP.
Ce reconfinement est spécifique à l’Angleterre. L’Ecosse, le Pays de Galles et l’Irlande du Nord décident de leur propre stratégie face à la crise sanitaire.
Critiqué pour la « lenteur » de sa réaction par l’opposition travailliste, Boris Johnson espère ensuite revenir à une approche locale, avec des restrictions imposées à chaque région selon le taux d’incidence du virus.
Il compte aussi sur les progrès du dépistage pour accompagner un futur déconfinement. S’il est concluant, un essai de dépistage massif qui débutera vendredi à Liverpool (nord), ville très touchée par le virus, pourra être étendu ailleurs dans le pays.
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