La question du recours à la visioconférence s’est invitée lundi dès la reprise du procès des attentats de janvier 2015, interrompu depuis trois semaines à cause de l’état de santé du principal accusé, contaminé par le Covid-19 et souffrant de symptômes persistants empêchant sa présence dans le box.
Peut-on faire comparaître un accusé aux assises par écran interposé ? De façon presque unanime, avocats de la défense et des parties civiles ont refusé cette solution et demandé à la barre une nouvelle suspension pour permettre la présence de l’accusé dans le box.
La cour d’assises spéciale de Paris, qui juge depuis le 2 septembre 14 personnes, dont trois en leur absence, pour leur soutien présumé aux auteurs des attentats de Charlie Hebdo, Montrouge et de l’Hyper Cacher, rendra sa décision lundi à 14H30.
Le procès avait été suspendu le 31 octobre après la découverte de trois cas de contamination au coronavirus parmi les accusés. Parmi eux: Ali Riza Polat, Franco-Turc de 35 ans présenté comme le « bras droit » du tueur de l’Hyper Cacher Amédy Coulibaly, jugé pour « complicité » de crimes terroristes.
Cette suspension avait été prolongée le 16 novembre en raison de « troubles digestifs » persistants de M. Polat, incarcéré dans une prison parisienne, qu’un médecin avait jugé incompatibles avec sa présence dans le box.
Un dernier examen médical, réalisé jeudi, a conclu que l’accusé n’était toujours pas en mesure de comparaître. Mais le président a estimé que « sa participation par visioconférence » était « possible » pour permettre à l’audience de redémarrer.
Le magistrat s’est appuyé sur une ordonnance prise la veille par le gouvernement autorisant exceptionnellement, le temps de la crise sanitaire, que l’ultime partie d’un procès criminel – plaidoiries et réquisitions – puisse se dérouler en l’absence physique des accusés.
Cette possibilité, laissée à l’appréciation des présidents de cours d’assises, a provoqué lundi un tir de barrage des avocats, après une série de tribunes parues durant le week-end dénonçant « une violation inique et flagrante des droits fondamentaux ».
Cette ordonnance constitue un « coup d’Etat contre les lois de la République », a plaidé l’avocate de M. Polat, Isabelle Coutant-Peyre. « En cas d’utilisation de la visioconférence pour des questions d’incapacité physique à comparaître, la défense s’en ira », a prévenu Me Safya Akorri, qui défend un autre accusé.
Ces critiques ont été relayées par les parties civiles. « Rien n’est plus attentatoire à l’état de droit et à la démocratie qu’un changement de règles dans un procès en cours », a estimé Me Antoine Comte, avocat de plusieurs victimes de l’attentat contre Charlie Hebdo.
Le procès, ouvert le 2 septembre, devait initialement prendre fin le 10 novembre.
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