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Amadou Dia, du service de la France coloniale à la Mauritanie indépendante

Drapé dans un grand boubou blanc, ses décorations bien ajustées, Amadou Mamadou Dia, 92 ans, se remémore 60 ans après la période historique qui a vu la Mauritanie tourner la page de la colonisation et lui-même passer des rangs de l’armée française à ceux de la nouvelle armée nationale.

A la veille du 60ème anniversaire de l’indépendance célébrée samedi, il raconte dans un français parfait un destin personnel pris dans le flot de l’Histoire africaine et mondiale et de la décolonisation: 16 années dans l’armée française, de l’Indochine à l’Algérie, 19 dans l’armée mauritanienne, puis une carrière au service de l’Etat.

De son engagement dans l’armée française, il ne se souvient que de moments « très intenses », à commencer par l’incorporation, « au milieu de mes propres frères, les aînés africains, tirailleurs et leur encadrement », et les caporaux chefs de chambrée qui intimaient d’obéir, sinon « je (te) casse la gueule ».

Il a servi deux fois en Indochine, territoire asiatique de l’ancien empire français couvrant les actuels Cambodge, Laos et Vietnam. Participant avec la France à la guerre contre les Vietnamiens (1946-1954), il a eu le bras droit traversé par une balle.

Puis ce fut l’Algérie, également en guerre (1954-1962). Les soubresauts de la décolonisation, non pas en Algérie mais en Guinée, lui ont valu d’assurer cinq commandements parce que les Guinéens avaient quitté les rangs français en Algérie quand la Guinée a pris son indépendance en 1958 et refusé d’intégrer, avec d’autres, la Communauté française proposée par le général de Gaulle.

En 1960, « j’étais en Algérie lorsque Moktar Ould Daddah a proclamé l’accession de notre pays à la souveraineté internationale, sous une tente, dans une capitale naissante, à peine sortie des sables », Nouakchott, dit-il, une évocation à laquelle ses yeux s’illuminent.

– Le souci de la jeunesse –

Il est rentré un an après, « pour participer à cette grande oeuvre des Mauritaniens, des courageux Mauritaniens qui sont endurants et d’une bravoure rare ».

Lui qui a été l’un des nombreux soldats à avoir endossé l’uniforme mauritanien après le français, il a mis à profit son expérience guerrière en devenant instructeur et un des premiers cadres de l’armée nationale.

Il a suivi là les tumultes de l’histoire indépendante de son pays, comme la guerre du Sahara occidental (de 1975 à 1979 en ce qui concerne la participation de la Mauritanie), le renversement de Mokhtar Ould Daddah en 1978, puis la succession de coups d’Etat et tentatives de coups d’Etat.

Devenu colonel, il a quitté l’armée au début des années 1980, été avocat général auprès de la cour spéciale qui a condamné Moktar Ould Daddah par contumace aux travaux forcés à perpétuité, et été ministre de l’Intérieur sous l’une des juntes au pouvoir en 1983-84.

« Moktar avait commis l’erreur d’impliquer son pays dans une guerre sans consulter le Parlement. C’était une grave erreur », dit-il en faisant référence au Sahara occidental.

A 92 ans, il dirige encore l’Office national des anciens combattants et médite sur l’indépendance et la gouvernance: « L’Afrique, nos pays, sont allés à l’indépendance. On n’a pas appris aux civils ce qu’on aurait dû leur apprendre. Les militaires, on leur a appris un peu à commander des petites, moyennes ou grandes unités. Mais commander une unité et gérer un pays, c’est différent. Celui qui commande un pays et qui ne s’occupe pas des jeunes, ne s’occupe pas des plus démunis, n’a rien fait ».

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