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Tempête sur l’IEP de Grenoble: des professeurs accusés d’islamophobie

En plein débat sur « l’islamo-gauchisme » au sein des universités, l’Institut d’études politiques (IEP) de Grenoble est en proie à des tensions autour d’accusations d’islamophobie visant deux professeurs par le biais d’un affichage sauvage qui fait désormais l’objet d’une enquête.

Cette dernière, ouverte ces dernières heures par le parquet pour « injure publique » et « dégradation », est le dernier épisode d’une polémique autour d’un cours sur l’islam en France et de la préparation d’une « Semaine de l’égalité » contre les discriminations.

Un malaise qui s’est cristallisé jeudi quand des étudiants ont placardé à l’entrée de l’institution des affichettes indiquant: « Des fascistes dans nos amphis. L’islamophobie tue ». Le tout accompagné du nom de deux professeurs et relayé en photo par des syndicats étudiants sur les réseaux sociaux.

« Traiter des gens de +fasciste+ est une injure (…). Il y a un vrai danger à ce que ces professeurs soient menacés et subissent des conséquences sous cette exposition là », a expliqué à l’AFP le procureur de la République de Grenoble Eric Vaillant, répondant ainsi au signalement fait vendredi par la direction de l’IEP.

« Les menaces, les injures et les pressions n’ont pas leur place dans l’enseignement supérieur », a pour sa part souligné dimanche dans un communiqué la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Frédérique Vidal, elle-même au coeur d’une polémique pour ses récents propos sur l' »islamo-gauchisme » à l’université.

Condamnant « fermement ces faits », elle a aussi annoncé son intention de diligenter « dans les meilleurs délais » et « en parallèle à l’enquête judiciaire » une mission de l’inspection générale de l’éducation « afin d’établir les responsabilités de chacun et de contribuer à rétablir la sérénité au sein » de l’établissement.

Un cours intitulé « Islam et musulmans dans la France contemporaine », dont le professeur en charge, est visé par l’affichage sauvage, est dans le collimateur de l’Union syndicale Sciences Po Grenoble (US) – le premier syndicat étudiant de l’IEP.

Dans un appel sur Facebook le 22 février, le syndicat avait demandé des témoignages d’étudiants sur d’éventuels « propos problématiques » qui y auraient été tenus, sans nommer l’enseignant.

L’US expliquait notamment qu’il souhaitait faire « retirer » cet enseignement « des maquettes pédagogiques pour l’année prochaine si, lors de ce cours, des propos islamophobes y étaient dispensés comme scientifiques ».

En réaction, le maître de conférence avait, dans un courriel, demandé aux étudiants appartenant au syndicat « de quitter immédiatement (ses) cours et de ne jamais y remettre les pieds ». Une injonction qui avait fait l’objet quelques jours plus tard d’une plainte pour « discrimination syndicale », classée sans suite depuis.

C’est « un appel à la délation » avec pour conséquence « une situation de danger grave et imminent », a renchéri l’avocat du professeur, Me Eric le Gulludec, interrogé par l’AFP.

De son côté, l’Union syndicale assure que son appel ne relève que « d’une habitude de sondages menés régulièrement auprès des étudiants ». Interrogée par l’AFP, une porte-parole du syndicat a démenti la paternité de l’affichage sauvage.

– « Vindicte populaire » –

L’Unef, dont la branche grenobloise a aussi relayé ces affiches sur les réseaux sociaux, a reconnu dimanche une initiative « maladroite et dangereuse » dans un communiqué, réaffirmant « son opposition à toute haine, à tout lynchage public et son attachement à la liberté d’expression ».

Le deuxième professeur visé par le collage est un professeur d’allemand qui enseigne à l’IEP depuis 25 ans. La polémique le concernant serait née fin novembre après un groupe de travail informel, constitué d’enseignants et d’étudiants, pour préparer la semaine de « l’Égalité et contre les discriminations »

« Je m’étais inscrit pour préparer une journée thématique au titre: racisme, islamophobie, antisémitisme (…). Je comptais contester dans la discussion avec ma collègue et mes étudiants cet alignement de ces trois termes dans une seule thématique », a-t-il raconté sur l’antenne de BFMTV.

Ce dernier a indiqué avoir été « exclu du groupe de travail parce que les étudiants se disaient blessés », estimant faire l’objet depuis janvier d’une campagne menée par les « plus extrémistes » d’entre eux. En « congé maladie », l’enseignant prépare la suite judiciaire éventuelle à donner.

« Je pense qu’on devrait tous prendre la mesure de ce qui s’est passé avec l’assassinat ignoble de Samuel Paty », a réagi dimanche devant la presse le ministre de l’Intérieur Gérarld Darmanin, en déplacement à Tourcoing, appelant à « protéger » les enseignants de « la vindicte populaire ».

Contactée par l’AFP, la direction de l’établissement n’avait toujours pas réagi à ces informations dimanche.

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