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Dans les camps surpeuplés, nombre de Rohingyas brisent le tabou de la contraception

L’imam Abdur Rashid, réfugié rohingya dans un camp du Bangladesh, reste convaincu que les enfants sont des bénédictions divines, mais avec déjà six petites bouches à nourrir, son épouse et lui ont choisi de se prémunir contre un septième cadeau du ciel.

Au début de l’année, sa femme Nosmin s’est fait poser un implant contraceptif, bafouant ainsi les préceptes de certaines communautés musulmanes.

Depuis que le couple a trouvé refuge au Bangladesh, il y a cinq ans, la vie dans le camp surpeuplé a changé bien des perspectives, dont celle de fonder une famille nombreuse.

Selon les chiffres de l’agence des Nations unies pour les réfugiés, près des deux tiers des couples rohingyas ont recours aujourd’hui à des moyens de contraception, quasi inemployés avant leur exil.

Environ 750.000 Rohingyas ont fui les exactions de l’armée en Birmanie et cherché asile en 2017 au Bangladesh voisin, où se trouvaient déjà plus de 100.000 réfugiés, victimes de précédentes violences.

– « Ne pas engendrer » –

« Les enfants sont des bénédictions de Dieu et c’est lui qui leur fournit les produits de première nécessité », déclare Abdur Rashid à l’AFP, « mais nous sommes coincés dans ce camp sordide depuis des années maintenant, je préfère ne pas engendrer une nouvelle vie dans un contexte aussi rude ».

Il y a quelques années à peine, une majorité de Rohingyas pensait que le contrôle des naissances allait à l’encontre de leur foi. Mais désormais, Abdur Rashid, comme des centaines de chefs religieux des camps rohingyas prônent l’usage de moyens contraceptifs dans leurs sermons.

Ils se sont portés volontaires pour mener une campagne de santé publique qui, selon les travailleurs humanitaires et les autorités bangladaises, a entraîné un changement radical des attitudes à l’égard du planning familial.

Sur les six premiers mois de l’année, quelque 190.000 visites de planning familial, y compris pour des avortements, ont été enregistrées.

« Un jour, je voudrais peut-être avoir un autre bébé. Mais pas tout de suite », confie à l’AFP Noorjahan Begum, 25 ans, déjà mère de deux enfants.

Son fils de six mois dans les bras, Mme Begum venait de se rendre dans la clinique la plus proche, située à une journée de marche, pour demander l’interruption de sa troisième grossesse.

Dépendante de l’aide humanitaire pour survivre, la jeune femme explique n’avoir actuellement pas les ressources suffisantes pour subvenir aux besoins d’un troisième enfant.

– « Vie plus rude » –

« Si Dieu le veut, j’opterai pour une contraception permanente », ajoute-t-elle.

Selon les experts en santé publique, les réfugiés eux-mêmes ont été les plus enthousiastes à soutenir la campagne du planning familial.

« Quand ils sont arrivés ici, presque tous les Rohingyas que nous avons rencontrés n’avaient jamais entendu parler de préservatifs ou de pilules contraceptives », explique à l’AFP le chef du bureau local du planning familial, Pintu Kanti Bhattacharjee.

« Maintenant, ils s’en félicitent. Ils comprennent que trop d’enfants peut rendre leur vie plus rude », ajoute-t-il.

Pendant des décennies avant l’exil, les Rohingyas ont été soumis à des politiques discriminatoires par les autorités birmanes qui les traitaient comme des immigrés clandestins venus du Bangladesh, malgré leur présence en Birmanie établie de longue date.

En leur refusant la citoyenneté, le gouvernement birman a empêché ces apatrides de se déplacer librement, les confinant dans une région isolée du pays.

Les autorités birmanes avaient aussi tenté d’interdire aux couples rohingyas d’avoir plus de deux enfants, en exigeant un engagement écrit de leur part en échange de la délivrance de leurs certificats de mariage.

Le Bangladesh s’efforce de subvenir aux besoins de l’immense population de réfugiés traumatisés.

Mais les Rohingyas sont de plus en plus victimes d’hostilités aussi sur cette terre d’accueil.

Le coup d’Etat militaire de février 2021 en Birmanie a éloigné toute perspective d’accord sur un retour dans leur pays natal. Ils n’ont nulle part où aller.

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