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L’horreur historique avance péniblement dans ses ténèbres

Les auteurs autrichiens de la morosité, Veronika Franz et Severin Fiala, ne sont pas étrangers aux approches masochistes et sombres. Le bain du diable correspond à une obscurité sous-jacente présente dans leurs films précédents Bonne nuit maman et Le chalet, comme un spectre qui souffle dans votre cou, mais le contexte historique de leur nouveau film ajoute une piqûre inhumaine. Franz et Fiala doivent beaucoup aux recherches de Kathy Stuart sur les cas de « suicide par procuration » des XVIIe et XVIIIe siècles en Europe centrale germanophone et en Scandinavie, en basant leur protagoniste sur la paysanne condamnée Eva Lizlfellnerin (1736-1762). Le récit exhume des squelettes longtemps enfouis dans les livres d'histoire autrichiens pour une marque nationaliste d'horreurs sociétales, à l'image de l'agonie introspective du film de Jennifer Kent. Le rossignol. Le bain du diable est une capsule temporelle remplie de chagrin et de désespoir, mais à deux heures précises, ses méthodes exténuantes d'études sociales de films d'horreur peuvent sembler exaspérantes à l'excès.

La musicienne Anja Plaschg joue le rôle d'Agnès, jeune mariée, tout sourire, en train de célébrer son mariage avec son mari Wolf (David Scheid). Ils s'installent dans une routine conjugale courante au XVIIIe siècle, où Agnès est cantonnée au rôle de femme au foyer, qui doit s'occuper des écuries, préparer les repas et accomplir des tâches « féminines ». Le bonheur conjugal s'estompe rapidement lorsque la mère de Wolf, Gänglin (Maria Hofstätter), critique sévèrement la capacité d'Agnès à remplir ces rôles prédéterminés, et elle se sent ostracisée dans sa propre maison. Anges est visiblement malade, tant mentalement que physiquement, mais elle est obligée de maintenir son statut au village, dans son couple et en tant qu'enfant de Dieu. Qu'il s'agisse de dépression ou de Satan qui tient Agnès dans ses griffes, cela n'a pas d'importance : il n'y a pas d'échappatoire.

Le bain du diable fonctionne selon les principes de l'horreur folklorique, mais ne présente rien de fantastique en dehors des rêves fébriles d'Agnès. Alors que celle de Robert Eggers La sorcière transforme d'anciens contes d'enseignements religieux oppressifs en images d'horreur pure et simple, Le bain du diable reste ancré et terrestre. Franz et Fiala veulent que le parcours d'Agnès soit compréhensible selon les normes modernes de santé mentale, attirant les tensions des civilisations où les sentiments dépressifs ont engendré mauvais traitements et blasphèmes. Agnès est maltraitée, contrôlée et privée de toute autonomie, c'est ce qui est terrifiant. Ce qui est décrit, c'est comment d'innombrables femmes ont vécu dans les années 1700, puis sont mortes, et Le bain du diable est un examen douloureusement traumatisant des efforts déployés par des personnes atteintes comme Agnès et Eva pour s'échapper.

Franz et Fiala génèrent une atmosphère et un ton avec une humeur déchirante à revendre. Les forêts de Basse-Autriche et les ruines du château de Neuchâtel composent un paysage moussu et marécageux qui isole désespérément des quelques fermes où résident les villageois, créant un terrain ouvert où Agnès peut se promener. Plaschg ne gaspille pas son environnement alors qu'elle s'enfonce plus profondément dans la manie, trouvant des cachettes creusées dans le terrain où elle peut se blottir en position fœtale, se blottissant près de Mère Nature, loin des gens. La musicienne devenue actrice laisse son psychisme sombrer dans un délire presque comateux, se détachant de l'existence comme si l'esprit d'Agnès avait été aspiré par le vide. Plaschg nous fait regarder alors qu'elle explore les forêts environnantes, cherchant refuge contre ses démons, aidée par une partition originale – de Plaschg – qui frotte les cordes et pince les notes de manière troublante.

Le problème devient, alors qu'Agnès se dégrade progressivement, que la passion derrière les intentions de Franz et Fiala se transforme Le bain du diable dans un test d'endurance marathon. Le récit reproduit le rythme avec lequel Agnès avance péniblement dans la boue jusqu'aux tibias, alors que le respect historique tente de se doubler alors que l'horreur folklorique refroidit. Il s'agit d'une tâche suffocante et ardue qui soumet les spectateurs à des traditions barbares des années 1700, impliquant des blessures purulentes comme traitements de guérison et rendant la justice par le biais de décapitations. Tout sèche et devient cassant. Les cinéastes adorent le talent artistique derrière les pannes lentes, et même si les implications dans le monde réel sont carrément accablantes, notre temps passé avec Agnès diminue à la fin. Bien qu'il raconte une histoire cyclique qui explique une atrocité introductive à travers les expériences d'Agnès, il est beaucoup plus linéaire que prévu, laissant un arrière-goût décevant.

Au crédit de tous, Le bain du diable est un psychodrame d'époque morbide et impitoyable qui vous fera vous sentir comme une poubelle (exprès). Franz et Fiala sont leurs signatures, mais c'est jusqu'à présent mon œuvre la moins préférée. Le kilométrage variera, dicté par votre appréciation des avalanches méthodiques de chagrin motivées par des pressions puritaines. Tout est minimaliste, ponctué par le contexte dévastateur des recherches qui ont contribué à façonner le scénario de Franz et Fiala. Certains téléspectateurs reconnaîtront le dévouement, d’autres verront leur patience mise à l’épreuve. Ce n'est pas si différent de Bonne nuit maman ou Le chaletmême si la formule du duo n'a pas encore été aussi déséquilibrée et lente.

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