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Des forces déployées à Khartoum avant une grande manifestation

Des forces ont été déployées dimanche sur les principales artères de la capitale soudanaise Khartoum avant une grande manifestation organisée contre le pouvoir militaire, sur fond d’appels à la retenue pour éviter une nouvelle répression sanglante.

L’Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance de la contestation, a appelé à une mobilisation massive pour réclamer un transfert du pouvoir aux civils, le premier appel à un rassemblement de cette envergure depuis la dispersion du sit-in devant le QG de l’armée à Khartoum le 3 juin.

La marche du « million » pourrait être un test pour jauger la capacité à mobiliser. Mais aussi pour le Conseil militaire de transition, qui tient les rênes du pays depuis la destitution et l’arrestation le 11 avril par l’armée du président Omar el-Béchir.

Les autorités bloquent depuis des semaines l’Internet, outil stratégique pour mobiliser les manifestants dès le début du mouvement de contestation inédit au Soudan le 19 décembre 2018.

En prévision de la manifestation qui doit débuter à la mi-journée, les paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF) ont été déployés sur plusieurs places de Khartoum, à bord de leurs habituelles camionnettes dotées de mitrailleuses, a constaté un correspondant de l’AFP.

Le trafic est moins dense qu’à l’accoutumée et de nombreux magasins ont fermé.

« Je n’ai pas ouvert ma boutique pour des raisons de sécurité », a indiqué à l’AFP Ahmed Mohamed.

– « Utiliser la force » –

La contestation a été déclenchée initialement par le triplement du prix du pain par les autorités dans un pays pauvre à l’économie exsangue.

Les manifestations dans les villes soudanaises se sont ensuite transformées en contestation contre le pouvoir du général Béchir, qui dirigeait le pays d’une main de fer pendant près de trois décennies.

Epicentre de la contestation, le sit-in devant le QG de l’armée, entamé le 6 avril, a été brutalement dispersé le 3 juin.

Au moins 128 personnes ont péri dans la répression qui a duré plusieurs jours, la grande majorité dans la dispersion du sit-in, selon des médecins proches de la contestation. Les autorités ont fait état de 61 morts.

Les RSF ont été accusées par les manifestants, des ONG et des experts d’être à l’origine de cette dispersion.

Un comité d’investigation mis sur pied par le Conseil militaire a reconnu que des « officiers et des soldats » étaient impliqués dans la dispersion du sit-in, mais le Conseil militaire a assuré avoir donné l’ordre de mener une opération antidrogue dans un secteur voisin, qui a débordé et mal tourné.

Samedi, les généraux ont averti qu’ils feraient porter à l’ALC « l’entière responsabilité » en cas de « perte humaine » ou de tout « acte de vandalisme » pendant les manifestations. Le même jour, une conférence de presse organisée par un groupe de la contestation a été interdite.

L’ALC a dévoilé les trajets des cortèges à Khartoum et dans la ville voisine d’Omdourman, qui doivent mener les manifestants aux domiciles des « martyrs » tués le 3 juin.

« Je m’attends à un nombre important de manifestants, et c’est très possible que les forces de sécurité utilisent la force », estime Moustafa, 25 ans, qui compte défiler.

– « Le monde observe » –

L’Union européenne a appelé les militaires au pouvoir à la retenue. « Il est du devoir du Conseil militaire de transition d’assurer la sécurité de tous et de s’abstenir de tout recours à la violence contre les manifestants ».

Pour Amnesty International, « le conseil militaire ne doit pas laisser le pays glisser vers plus de répression. Le monde observe ».

La mobilisation de dimanche « sera une tentative du peuple de montrer que c’est lui qui a le dernier mot », estime Khaled al-Tijani, rédacteur en chef du journal Elaff.

Dernièrement, les protestataires s’étaient contentés de petits rassemblements à travers la capitale, parfois dispersés par les forces de sécurité avec des gaz lacrymogènes.

Talal, jeune manifestant de 29 ans, s’attend à ce que les forces de sécurité recourent à la violence. « si des rassemblements assez grands peuvent avoir lieu à Khartoum, ils vont briser la barrière de la peur, et davantage de gens vont descendre dans la rue les jours suivants », espère-t-il.

Malgré le bras de fer, les chefs de la contestation et le Conseil militaire se disent ouverts à une reprise des négociations, à travers une médiation de l’Ethiopie et de l’Union africaine, pour dessiner les grandes lignes de la transition à venir.

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