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Le quotidien des policiers, en « mode survie », après l’attaque de Viry-Châtillon

« On ne cherche plus à nous blesser mais à nous tuer »: le procès de l’attaque des policiers de Viry-Châtillon (Essonne) s’ouvre mardi, trois ans après une agression qui a bouleversé le travail et affecté le moral des policiers de terrain, comme Maxime qui confie son « traumatisme ».

Porter systématiquement son casque, ne jamais tourner le dos, et l’éventualité de la mort en tête. La violence, Maxime (le prénom a été modifié) affirme y avoir déjà été confronté.

Depuis 2012, il arpente quotidiennement des quartiers dits sensibles, comme l’éruptive cité de la Grande borne, à cheval sur les villes de Grigny et Viry-Châtillon.

Pourtant, ce trentenaire l’assure, avec l’agression de ses collègues, un cap a été franchi. « On a atteint un niveau de violence jamais égalé. Au début, c’était les insultes, puis les jets de pierres mais maintenant, c’est la mort ».

« On ne cherche plus à blesser mais à nous tuer, nous, forces de l’ordre », assène-t-il avec force.

Le 8 octobre 2016, deux voitures de police stationnées à proximité de la Grande Borne, un labyrinthe de logements sociaux considéré comme l’une des cités les plus sensibles d’Île-de-France, étaient prises d’assaut par une vingtaine de jeunes encagoulés et gantés.

En quelques minutes, ils parviennent à briser les vitres des voitures et jettent dans l’habitacle des cocktails molotov. Grièvement blessés, les quatre policiers s’extirpent in extremis de leurs voitures transformées en torches.

Deux agents sont gravement brûlés, les deux autres plus légèrement. L’un d’eux porte les stigmates de cette attaque sur le visage malgré plusieurs greffes de peau.

« Une attaque barbare, sauvage, qui était destinée à tuer », avait réagi avec vigueur le ministre de l’Intérieur d’alors, Bernard Cazeneuve.

Une déclaration qui n’a pas suffi à apaiser la colère de toute une profession. Pendant un mois, une série de manifestations eurent lieu dans toute la France avec à chaque fois des centaines de policiers dans la rue.

– « Cocotte-minute » –

Ce jour là, Maxime ne travaillait pas. Les évènements, il les a donc suivis à distance.

« Traumatisant »; « choquant ». Malgré les trois années qui se sont écoulées, il peine toujours à mettre des mots sur cette attaque. Reste pourtant une certitude: « Ce qui s’est passé, ça aurait pu nous arriver à tous ».

« Hier comme aujourd’hui, personne n’est à l’abri », poursuit-il, résigné.

Malgré l’effroi, il faut retourner sur le terrain. « Pour nous, c’était important de montrer qu’on n’avait pas peur d’eux et qu’on n’allait pas lâcher un centimètre de ce territoire. Hors de question d’abandonner la partie », explique-t-il.

Le retour se fait toutefois avec pléthore de nouvelles consignes de sécurité: « Désormais, on est en mode survie. Rien n’est laissé au hasard ».

« C’est fatiguant d’être constamment en alerte mais on n’a pas le choix. En moins de cinq minutes, le pire peut arriver. Personne ne se dit +c’est arrivé un fois, ça ne recommencera plus+ », ajoute-t-il.

Et d’égrener les exemples. Comme ce week-end début septembre où un policier a été blessé par un tir de mortier. Ou ce fameux 13 juillet, toujours à la Grande Borne, où il a cru que « la cité allait sauter » : une pluie de mortiers était tombée sur les forces de l’ordre.

« On est assis sur une cocotte-minute. Ca peut exploser à n’importe quel moment, peu importe le prétexte ».

A-t-il pensé à demander sa mutation ? « Oui, répond-il sans détour. J’ai pas signé pour me faire tuer ».

Mais c’est surtout à sa femme et à ses enfants qu’il pense sans cesse. « Pour eux, c’est dur. Dès que j’ai cinq minutes de retard, ils m’appellent pour savoir où je suis et si je vais bien ».

Sa mutation, il ne l’a finalement pas demandée. « Mon heure n’est pas encore venue », précise-t-il. En attendant, avec ses collègues, ils ont les yeux rivés sur le procès…. et sur son verdict. « On va suivre ça de très près. Il faut que la justice passe ».

Le procès doit se tenir jusqu’au 6 décembre.

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