Le militant de la fin de vie « digne », Alain Cocq, atteint d’une maladie incurable, a annoncé, dans la nuit de vendredi à samedi sur Facebook, avoir cessé son traitement, toute alimentation et hydratation, se laissant ainsi mourir en direct afin de dénoncer « l’agonie » contrainte par la loi actuelle sur la fin de vie.
« Le chemin de la délivrance commence et, croyez-moi, j’en suis heureux », a déclaré Alain Cocq sur son compte Facebook, peu après minuit, en annonçant avoir « fini son dernier repas » et cessé toute hydratation et tout traitement. « Je sais que les jours qui m’attendent vont être difficiles mais j’ai pris ma décision et je suis serein », a-t-il ajouté.
« Ce n’est pas un suicide », précise le malade, rappelant qu’il est catholique. « Je suis dans le cas prévu par la loi où un patient peut arrêter son traitement », explique-t-il, disant que, dans ces cas-là, le décès suit « dans les deux à cinq voire sept jours ». « Moi, avec mon état, ça risque d’être rapide ».
« Ca sera très dur mais ça ne sera pas trop grand chose par rapport à tout ce que j’ai vécu », poursuit Alain Cocq depuis le lit médicalisé installé à son domicile et qu’il ne peut plus quitter. Tendant un gobelet en plastique à la caméra, il lance par la suite un dernier mot: « Voilà les amis, je bois un dernier coup à votre santé », avant de conclure son message très poignant par un « ainsi va la vie. Au revoir ».
Alain Cocq avait peu auparavant essuyé un refus du président Emmanuel Macron de l’aider à mourir en autorisant un suicide assisté. « Votre souhait est de solliciter une aide active à mourir qui n’est aujourd’hui pas permise dans notre pays », a écrit M. Macron en réponse à la demande d’Alain Cocq d’autoriser un médecin à lui prescrire un barbiturique, « à titre compassionnel », afin qu’il puisse « partir en paix ».
La loi Claeys-Léonetti sur la fin de vie, adoptée en 2016, autorise la sédation profonde mais seulement pour les personnes dont le pronostic vital est engagé « à court terme ».
Or M. Cocq, même s’il se dit « en phase finale depuis 34 ans » du fait d’une maladie dégénérative très douloureuse, ne peut pas prouver que sa fin de vie approche à court terme.
Le militant de la mort « dans la dignité », qui a fait plusieurs tours d’Europe en fauteuil roulant pour plaider sa cause, a donc mis à exécution sa décision de « dire stop », comme il l’a récemment expliqué à l’AFP.
« Petit à petit, tous les organes vitaux vont être touchés. Si c’est pour regarder le plafond comme un con à attendre que ça se passe, non », a déclaré M. Cocq, 57 ans.
– Entraîner « une prise de conscience » –
Afin de « montrer aux Français ce qu’est l’agonie obligée par la loi Leonetti », Alain Cocq diffusera sa fin de vie dès samedi matin au réveil, « en direct sur (sa) page Facebook ».
A l’entrée de son modeste appartement du quartier défavorisé des Grésilles, à Dijon, Alain a affiché son « attestation de refus de soin » par laquelle il interdit toute réanimation.
« Alain a déjà été ranimé neuf fois », explique Sophie Medjeberg, vice présidente de l’association « Handi mais pas que ». « Et à chaque fois avec une nouvelle dégénérescence. Il est enfermé dans son corps », ajoute Mme Medjeberg, qu’Alain Cocq a prise pour mandataire afin que « le combat continue ».
« Alain passe le relais », assure-t-elle, en disant espérer que la mort qu’il a prévue en direct provoquera un « électrochoc », « afin d’autoriser le suicide assisté comme en Belgique ou en Suisse ». « Huit Français sur dix sont pour le suicide assisté », a ajouté Mme Medjeberg.
Le cas d’Alain Cocq relance la controverse sur la fin de vie, à l’image de l’affaire Vincent Lambert, un infirmier en état végétatif décédé en juillet 2019 après une sédation profonde voulue par son épouse et son neveu François, mais à laquelle ses parents se sont opposés.
Cela « montre que la loi Leonetti est une loi inhumaine », a déclaré son neveu François Lambert à l’AFP. M. Lambert a dit espérer que les images de la mort d’Alain Cocq entraîneront « une prise de conscience ».
GIPHY App Key not set. Please check settings