in

Les Chiliens votent en masse au référendum sur la Constitution

Les Chiliens votaient en masse dimanche au référendum sur un changement de Constitution, un an après l’éclatement d’un soulèvement social d’une ampleur inédite contre les inégalités.

A quelque trois heures de la fermeture des bureaux de vote, prévue pour 20H00 heure locale (23H00 GMT), de longues files d’attente témoignaient d’une forte affluence, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Dans la capitale Santiago, les électeurs, dont de nombreux jeunes, patientaient calmement sous un soleil printanier, le visage masqué et respectant entre eux une distance d’un mètre, en raison de la pandémie provoquée par le coronavirus.

« Le Chili mérite une catharsis nationale et je pense que c’est le début », a déclaré à l’AFP Felipe, un ingénieur de 35 ans, devant un bureau de vote du centre-ville.

De nombreux électeurs évoquaient dimanche un scrutin « historique ».

Après avoir voté dans un quartier aisé de Santiago, le président conservateur Sebastian Piñera a appelé les Chiliens à se rendre aux urnes « parce que chaque voix compte ». « Il faut rejeter la violence et prendre le chemin de l’unité », a-t-il ajouté.

Remplacer la Constitution héritée de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990) était une des revendications des personnes descendues dans la rue pour manifester à partir du 18 octobre 2019 afin de réclamer une société plus juste.

La loi fondamentale actuelle limite fortement l’action de l’Etat et promeut l’activité privée dans tous les secteurs, notamment l’éducation, la santé et les retraites.

Les 14,7 millions d’électeurs sont appelés à répondre à deux questions : « Souhaitez-vous une nouvelle Constitution ? » et « Quel organe devra rédiger la nouvelle Constitution ? »

Ils pourront choisir entre une « Convention mixte constitutionnelle » composée de citoyens et de parlementaires et une « Convention constituante » uniquement formée de citoyens.

Pour les partisans de l' »Apruebo » (« J’approuve »), essentiellement dans l’opposition du centre et de gauche, une nouvelle Constitution lèverait un obstacle essentiel à de profondes réformes sociales dans un pays parmi les plus inégalitaires d’Amérique latine.

« Depuis le début de la contestation, c’est la première véritable occasion que nous ayons pour qu’il y ait des changements dans la santé, l’éducation, etc. », explique à l’AFP Pilar Matus, une professeure de 47 ans.

Les défenseurs du « Rechazo » (« Je rejette »), qui rassemblent les partis les plus conservateurs, estiment qu’il est possible d’introduire des changements dans la loi fondamentale, garante selon eux ces dernières décennies de la stabilité du Chili, sans avoir besoin de la remplacer.

« C’était une pays qui fonctionnait bien en Amérique latine et maintenant les choses vont mal, on ne veut pas de ça pour notre pays », lâche Andrea Benson, 26 ans. « Ce n’est pas la peine » de changer de Constitution, dit-elle, estimant que les responsables politiques peuvent modifier les lois.

Selon les derniers sondages, l' »Apruebo » l’emporterait à hauteur de 60 à 75%. Malgré la pandémie qui a durement frappé le Chili (500.000 cas, dont 14.000 ont été mortels), les électeurs n’ont pas hésité à aller voter.

– Péché originel –

Jusqu’à cette date, aucune tentative de remplacement de la loi fondamentale n’avait abouti : la Constitution a été rédigée de sorte que les franges conservatrices de la société puissent se maintenir au pouvoir, y compris après la fin de la dictature.

« Le premier objectif de ce processus constitutionnel est de sortir de l’ombre de la dictature de Pinochet (…) d’avoir une nouvelle Constitution sans le péché originel d’avoir été préparée sous la contrainte », explique à l’AFP Marcelo Mella, un politologue de l’Université de Santiago.

Le deuxième objectif, ajoute-t-il, est de  » pouvoir résoudre par des moyens politiques et pacifiques les problèmes devenus structurels et qui paralysent le fonctionnement de la démocratie chilienne », tels que l’inégalité et l’exclusion.

Conséquence de la pandémie et hasard du calendrier : initialement prévu pour le 26 avril, le scrutin a été repoussé au 25 octobre.

Il se déroulera donc un an jour pour jour après le rassemblement historique de la Plaza Italia, dans le centre de Santiago, lorsque 1,2 million de personnes s’étaient retrouvées à manifester, un tournant dans la contestation.

Jusqu’à l’éclatement de la crise, le Chili était considéré comme un des pays les plus stables d’Amérique latine.

Déclenchée par une hausse du prix du ticket de métro à Santiago, la contestation a été nourrie par la colère de la population dénonçant la déconnexion des élites face au quotidien difficile du plus grand nombre et a pris de court l’ensemble de la classe politique.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

GIPHY App Key not set. Please check settings

    Des scientifiques de Washington détruisent le premier nid de frelons meurtrier aux États-Unis

    Un Palestinien battu à mort par des colons israéliens en Cisjordanie occupée