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Les Chiliens plébiscitent un changement de Constitution

Les Chiliens ont voté dimanche à une très forte majorité en faveur d’une nouvelle Constitution pour remplacer celle héritée de l’ère Pinochet, lors d’un référendum organisé un an après un soulèvement populaire massif contre les inégalités sociales.

Selon des résultats partiels portant sur 69,81% des bureaux de vote, les suffrages favorables à une nouvelle Constitution étaient largement en tête, avec 78,01% des voix, contre 21,99% pour le vote rejetant cette option.

Réagissant à ces résultats, le président conservateur Sebastian Piñera a appelé dans une allocution télévisée à « l’unité » du pays pour rédiger la « nouvelle Constitution ».

« Jusqu’à présent, la Constitution nous a divisés. A partir d’aujourd’hui, nous devons tous collaborer pour que la nouvelle Constitution soit un espace d’unité, de stabilité et d’avenir », a déclaré le chef de l’Etat.

Alors que le décompte des voix se poursuivait, des milliers de manifestants euphoriques se sont rassemblés dans le centre de Santiago, sur la Plaza Italia, épicentre de la contestation, pour fêter la « victoire », ont constaté des journalistes de l’AFP.

« Nous célébrons une victoire remportée sur cette place plus digne que jamais ! », s’enthousiasmait Graciela Gonzalez, une vendeuse de 35 ans, au milieu des chants, des pétards et des coups de klaxon.

Il y a un an jour pour jour, la contestation contre les inégalités avait connu un tournant lorsque 1,2 million de personnes s’étaient rassemblées sur cette place emblématique, rebaptisée « Place de la dignité ».

« Je n’ai jamais imaginé que nous Chiliens serions capables de nous unir pour un tel changement ! », s’enflammait Maria Isabel Nuñez, 46 ans, venue sur la place main dans la main avec sa fille de 20 ans.

Malgré la pandémie de coronavirus qui a durement frappé le Chili (500.000 contaminations, 14.000 décès), les électeurs se sont déplacés en masse, formant de longues files d’attente devant les urnes.

Le taux de participation officiel n’était pas encore connu mais le directeur de l’autorité électorale, Patricio Santamaria, a prédit un chiffre élevé.

De nombreux électeurs ont évoqué dimanche un scrutin « historique ». « Le Chili mérite une catharsis nationale et je pense que c’est le début », a déclaré à l’AFP Felipe, un ingénieur de 35 ans.

Dans la matinée, Sebastian Piñera avait appelé les Chiliens à se rendre aux urnes « parce que chaque voix compte ».

– Problèmes structurels –

Remplacer la Constitution héritée de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990) était une des revendications des manifestations lancées à partir du 18 octobre 2019 afin de réclamer une société plus juste.

La loi fondamentale actuelle limite fortement l’action de l’Etat et promeut l’activité privée dans tous les secteurs, notamment l’éducation, la santé et les retraites.

Les 14,7 millions d’électeurs étaient appelés à répondre à deux questions: « Souhaitez-vous une nouvelle Constitution ? » et « Quel organe devra rédiger la nouvelle Constitution ? »

Selon des résultats partiels portant sur plus de la moitié des bureaux de vote, l’option d’une « Convention constituante » uniquement formée de citoyens l’emporte par 79% des voix, contre 21% pour une « Convention mixte » composée de citoyens et de parlementaires.

Pour les partisans de l' »Apruebo » (« J’approuve »), essentiellement dans l’opposition du centre et de gauche, une nouvelle Constitution lèvera un obstacle essentiel à de profondes réformes sociales dans un pays parmi les plus inégalitaires d’Amérique latine.

« Depuis le début de la contestation, c’est la première véritable occasion que nous ayons pour qu’il y ait des changements dans la santé, l’éducation », a expliqué à l’AFP Pilar Matus, une professeure de 47 ans, avant de voter.

Les défenseurs du « Rechazo » (« Je rejette »), qui rassemblent les partis les plus conservateurs, estimaient qu’il était possible d’introduire des changements dans la loi fondamentale, garante selon eux ces dernières décennies de la stabilité du Chili, sans avoir besoin de la remplacer.

« C’était une pays qui fonctionnait bien en Amérique latine et maintenant les choses vont mal, on ne veut pas de ça pour notre pays », a expliqué Andrea Benson, 26 ans.

Jusqu’à ce jour, aucune tentative de remplacement de la loi fondamentale n’a abouti. Tous aujourd’hui s’accordent à dire que la Constitution a été rédigée de sorte que les franges conservatrices de la société puissent se maintenir au pouvoir, y compris après la fin de la dictature.

L’objectif de « ce processus constitutionnel est de sortir de l’ombre de la dictature de Pinochet », a expliqué à l’AFP Marcelo Mella, un politologue de l’Université de Santiago.

Il s’agit aussi de « pouvoir résoudre par des moyens politiques et pacifiques les problèmes devenus structurels », tels que l’inégalité et l’exclusion.

Jusqu’à l’éclatement de la crise, le Chili était considéré comme un des pays les plus stables d’Amérique latine, encensé pour ses résultats macro-économiques.

Déclenchée par une hausse du prix du ticket de métro à Santiago, la contestation a été nourrie par la colère de la population dénonçant la déconnexion des élites face au quotidien difficile du plus grand nombre et a pris de court l’ensemble de la classe politique.

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