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Quarante ans après, un procès pour l’attentat de la synagogue de la rue Copernic

Quarante ans après l’attentat contre la synagogue de la rue Copernic à Paris, l’unique suspect retrouvé par la justice française est finalement renvoyé aux assises, au grand soulagement des victimes. Mais l’incertitude règne sur la présence de l’accusé, retourné au Canada après avoir bénéficié d’un non-lieu en 2018.

La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a en effet infirmé mercredi le non-lieu accordé à Hassan Diab, un universitaire libano-canadien de 67 ans accusé d’avoir posé la bombe.

Les avocats du professeur, qui n’a cessé de clamer son innocence, ont immédiatement annoncé un pourvoi en cassation pour tenter de contester ce revirement considérable dans un dossier où les indices contradictoires réunis par l’enquête sont âprement débattus depuis plus de dix ans.

Le 3 octobre 1980, l’explosion d’une bombe sur une moto devant une synagogue du XVIe arrondissement de la capitale, avait fait quatre morts et 46 blessés. Pour la première fois depuis la Seconde guerre mondiale, des personnes étaient tuées en France dans un attentat visant la communauté juive.

L’enquête, l’une des plus anciennes de l’antiterrorisme français, avait attribué l’attentat, non revendiqué, au Front populaire de libération de la Palestine-Opérations spéciales (FPLP-OS), groupe né d’une scission du FPLP et fondé par Wadih Haddad. Les renseignements avaient identifié Hassan Diab en 1999, après avoir mis la main sur son passeport retrouvé en octobre 1981 par la police italienne.

Son extradition, réclamée en 2008 par le juge antiterroriste Marc Trévidic, avait finalement été autorisée par le Canada fin 2014.

Placé en détention provisoire pendant trois ans, Hassan Diab avait été libéré en janvier 2018 après la décision des magistrats instructeurs d’abandonner les poursuites. Contre l’avis du parquet, qui avait fait appel, les juges avaient considéré que les charges réunies contre l’ancien étudiant de Beyrouth n’étaient « pas suffisamment probantes ». Il était alors retourné au Canada.

« Cette décision (de la cour d’appel, ndlr) est insensée (…) totalement contraire au droit et au dossier, et par conséquent ne puise son inspiration que dans le politiquement correct », a réagi sa défense dans une déclaration à l’AFP.

« Elle censure une décision prise par deux juges d’instruction, dont la motivation extrêmement rigoureuse, était proportionnée aux enjeux et à la gravité de faits », ont déclaré Mes William Bourdon, Apolline Cagnat et Amélie Lefebvre.

« L’innocence d’Hassan Diab sera nécessairement un jour reconnue malgré les pressions et les exhortations », ont-ils ajouté.

– « Long combat » –

« Je suis contente, cela faisait des années que nous demandions un procès », s’est félicitée Corinne Adler, partie civile venue écouter le délibéré. « Que tout s’arrête là m’aurait beaucoup peiné, pour toutes les victimes dont je fais partie », a déclaré celle qui, adolescente, célébrait sa bat-mitzvah lors de l’explosion.

« C’est une satisfaction d’obtenir un procès, presque la fin d’un long combat », a salué Me Bernard Cahen, avocat de la synagogue et de deux familles de victimes. « Si la cour d’assises déclare que M. Diab n’est pas coupable, au moins justice aura été rendue par une décision collégiale et contradictoire ».

« On a pu voir le soutien dont M. Diab bénéficie auprès de la justice du Canada, je doute qu’il y ait le moindre effort pour nous aider » à obtenir une nouvelle extradition, a toutefois regretté Me Eric Morain, avocat du policier en faction devant la synagogue.

Pour appuyer leur décision de non-lieu, les juges antiterroristes avaient souligné en 2018 qu' »un certain nombre d’éléments (..) permettent d’estimer qu’Hassan Diab se trouvait vraisemblablement au Liban pendant cette période ». Ce dernier, dont aucune empreinte n’a été retrouvée sur les pièces manipulées par les terroristes, assure qu’il passait alors ses examens à la faculté, une version corroborée par d’autres étudiants et son ex-épouse.

Le ministère public met au contraire en avant son passeport, porteur de tampons attestant un séjour en Europe du 20 septembre au 7 octobre 1980. Il s’appuie aussi sur des notes des renseignements incriminant M. Diab ainsi que des expertises graphologiques et sa ressemblance avec des portraits-robots.

Tout en reconnaissant des « doutes » sur sa présence à Paris, le parquet a toujours estimé que ces « éléments à charge et à décharge » méritaient au minimum d’être débattus devant une cour d’assises.

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