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Au Danemark, des « Men in Black » crient leur ras-le-bol des règles sanitaires

« La liberté, j’suis fan! Les restrictions sont ridicules »: Anders a choisi d’exprimer dans la rue son mécontentement face aux règles sanitaires anti-Covid. Deux fois par mois, il défile avec les « Men in Black », un mouvement hétéroclite inédit au Danemark, partiellement issu du hooliganisme.

En ce samedi de manifestation, ce plombier quadragénaire est là pour défendre son droit à se déplacer librement, sans masque, ni test ou vaccin.

« On devrait pouvoir décider nous-mêmes », explique-t-il à l’AFP à l’heure où, dans son pays, un nombre croissant d’activités est conditionné à la présentation d’un passeport sanitaire.

Un « coronapas » très largement accepté par les Danois, qui pour la plupart n’ont cure de la fronde.

Mais ils sont un millier ce jour-là à battre le pavé pour crier leur ras-le-bol. Pour beaucoup, le Covid n’est qu’une vilaine grippe, à la contagiosité contestable. La preuve, argumentent-ils, personne n’a jamais été malade après un de leurs rassemblements. Lesquels sont rarement suivis de tests de dépistage…

Etudiante de 29 ans et mère de famille, Vivian est venue d’Aarhus (ouest) pour dire que « les restrictions qu’impose le gouvernement ruinent le commerce et la santé mentale ».

Né sur Facebook fin 2020, les « Men in Black » forment le groupe le plus bruyant de la petite mouvance protestataire du pays scandinave, plus célèbre pour sa qualité de vie que pour sa verve contestataire.

Dans les rangs de ce mouvement partiellement issu du hooliganisme, de jeunes hommes vêtus de sweats noirs un peu inquiétants, cheveux ras ou visages encagoulés, cannettes de bière à la main, qui scandent « Mette Ciao » –en référence au prénom de la Première ministre– ou « Liberté pour le Danemark ».

Mais aussi des enfants, un gros cœur lumineux et des pancartes « embrassades gratuites » qui apportent un peu de jovialité.

Après avoir provoqué des tensions avec les forces de l’ordre l’hiver dernier, les défilés sont désormais extrêmement encadrés et se déroulent généralement dans le calme.

« J’aime qu’on puisse se voir, s’embrasser. Toute la vie sociale me manque. Et là, corona ou pas, je me suis fait 10-15 amis », se réjouit Ebsen. La quarantaine volubile, le Danois est venu avec son fils de 12 ans, qui a pâti de la fermeture des collèges pendant quatre mois.

– Tendances complotistes –

Parmi les manifestants, complotistes et anti-vaccins côtoient libertaires et quidams.

S’il a éconduit un militant anti-musulmans notoire, le mouvement couvre tout l’éventail politique. Mais son scepticisme à l’égard des partis établis rend toute tentative de récupération plus ardue.

Au Danemark, où la confiance envers les autorités est parmi les plus élevées du monde, une telle mentalité détonne.

« Ils partagent un certain niveau de défiance vis-à-vis du gouvernement et de la production de savoir », estime Eske Vinther Jensen, directeur d’une société d’analyse des réseaux sociaux.

Même si la mobilisation reste cantonnée « à une très petite part de la population », Facebook en particulier a joué un rôle essentiel dans l’émergence d’une cinquantaine de groupes anti-restrictions, note cet expert de la désinformation en temps du Covid-19.

Masque, passeport sanitaire, vaccination et durcissement des peines pour des entorses aux règles anti-Covid… La liste des griefs des « MIB » s’est allongée depuis janvier.

Pour Morten, l’un des hérauts du mouvement fort de plus de 23.000 supporters sur Facebook, « le corona est une arnaque ».

Son ami Dennis verse aussi dans le complotisme. Le Covid? « C’est une excuse pour rentrer les ADN dans une base de données ».

Cet entrepreneur quadragénaire dénonce l’aggravation des clivages dans une société très homogène. « Ce qu’ils font, c’est une équipe A et une équipe B (…) pour diviser le peuple, nous affaiblir. Je veux que le peuple redevienne un tout.

Que va-t-il rester de cette mobilisation maintenant que le Danemark commence à déconfiner?

« Il y a un petit risque que le mouvement +MIB+ se transforme en quelque chose de plus permanent mais cela va exiger un leadership plus fort, ce que nous n’avons pas vu jusqu’à présent, et un profil plus précis », avance Rasmus Dahlberg, universitaire spécialiste des crises.

Pour M. Vinther Jensen, ces rassemblements apportent « une possibilité de créer un débat public plus inclusif, intégrant des personnes que nous n’avons pas entendues avant ».

« C’est une bonne opportunité pour essayer de comprendre ce dont ils ont peur (…), si on pense que c’est seulement à propos du corona, je pense qu’on fait fausse route », dit-il.

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