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Au Mozambique, le mercenaire Dyck prédit un avenir « difficile »

Les hommes de Lionel Dyck débarrassent les armes de leurs hélicoptères, à quelques jours de leur retour en Afrique du Sud après une mission d’un an dans le nord du Mozambique, quand ils apprennent l’attaque des jihadistes contre Palma en mars.

Marche arrière toute, les mercenaires tireurs d’élite foncent sur zone, à moins de dix kilomètres du mégaprojet gazier piloté par le groupe Total. « A cinq jours près, on n’était plus là », raconte à l’AFP le fondateur du Dyck Advisory Group (DAG), société militaire privée.

Depuis la côte ouest de l’Afrique du Sud, ce colonel retraité de l’armée zimbabwéenne, 77 ans, expert en déminage mais aussi de la chasse aux tueurs de rhinocéros, s’inquiète du vide sécuritaire créé par le départ de ses hommes.

« C’est la période la plus dangereuse que le Mozambique ait jamais connue », avertit M. Dyck. « L’ennemi est confiant et il n’y a personne pour le combattre », ajoute ce dur à cuire, au regard bleu acier, qui en vu tellement d’autres.

L’armée mozambicaine est notoirement sous-entraînée et mal équipée. « A moins d’un miracle, ils (les jihadistes) vont dominer toute la zone », prédit-il.

– Soldat né –

Lionel Dyck est né en 1944 dans la colonie britannique de Rhodésie du Sud, voisine de l’Afrique du Sud. Il intègre l’armée à 17 ans et combat pendant quinze ans de guerre civile jusqu’à la fin de la domination blanche en 1979 et l’avènement du Zimbabwe.

« Ma mère raconte que tout petit, dès que je me suis tenu debout, j’ai voulu être soldat », dit-il. Tout jeune officier, il se demande s’il est prêt à mener des hommes: « Quel soulagement. Quand on m’a tiré dessus la première fois, je ne suis pas parti en courant! », plaisante-t-il.

Vers 40 ans, il a de faux airs de Paul Newman. Elancé, regard perçant. Aujourd’hui, ses cheveux blancs, ras, lui donnent une allure un poil sévère.

« J’ai la fibre aventurière », dit-il, maniant l’euphémisme. « J’ai grimpé toutes les montagnes, traversé la plupart des océans », avance-t-il encore, peu adepte de la fausse modestie.

Mais ses meilleurs souvenirs sont ses « batailles costaud » en Rhodésie, même s’il jure ne plus savoir quand il a tiré sur un ennemi la première fois. « Au cinéma, on vous fait croire que c’est un truc terrible. Pas vraiment, c’est ce qu’on est entraînés à faire », relativise-t-il.

Beaucoup de soldats en Afrique australe, marqués par des guerres civiles ou d’indépendance récentes – Zimbabwe, Angola, Mozambique -, es sont reconvertis comme mercenaires sur le continent.

« Depuis ma retraite de l’armée », en 1990, « je m’occupe de sécurité, d’une manière ou d’une autre », dit Lionel Dyck. « Penser et agir en soldat, c’est ce que j’ai toujours fait. »

– Guerilla –

Fin 2019, sa boîte, DAG, fondée sept ans plus tôt, est embauchée quelques semaines pour aider l’armée mozambicaine à combattre les groupes armés qui terrorisent la province pauvre mais riche en gaz du Cabo Delgado (nord). Ils y retournent quelques mois plus tard.

« Ca nous change pas beaucoup de la chasse aux braconniers », souligne-t-il. « Ce sont aussi des terroristes armés, qui vous tirent dessus. »

Le contrat récent de DAG, qui a pris fin en avril, consistait à appuyer les troupes au sol d’un soutien aérien. Sans les hélicos, les troupes « étaient tuées ou fuyaient ».

Les appareils de l’armée sont inadaptés à ces offensives de guerilla. « Il leur faut deux ou trois kilomètres pour changer de direction ». Pour combattre, « il faut être rapides, voyager léger côté matériel, viser l’efficacité, continuer à se déplacer ».

S’appuyant sur de la technologie et des témoignages, DAG réussit plusieurs fois à localiser et attaquer les campements ennemis. « Certaines bases étaient énormes, décrit-il, creusées dans la terre, avec un camouflage aérien ». Les jihadistes « ne cuisinaient qu’à certains moments, dissipant la fumée ».

« On pouvait seulement tirer d’en haut, il nous aurait fallu ensuite des troupes au sol… qui n’étaient pas là ».

Lionel Dyck ne souhaite pas commenter un rapport récent d’Amnesty International, accusant ses hommes d’avoir tiré sans dicernement sur des foules, contribuant à la mort de centaines de civils.

Le 24 mars, quand les groupes armés lancent une attaque d’ampleur contre Palma, « nos hélicoptères ont récupéré plein de nouveaux impacts de balles », plaisante le vieux soldat.

Quatre jours de combats, des dizaines de civils tués, puis les autorités annoncent avoir repris la ville. « Voeu pieux », selon M. Dyck.

L’armée n’est pas allée de maison en maison, pour vérifier que les jihadistes étaient tous partis. « Il aurait fallu de très nombreux soldats, c’est dangereux. »

L’avenir? « Je ne vois pas d’issue, juste des difficultés. »

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