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Jean Rottner, un ex-urgentiste à la tête d’une région convalescente

Médecin urgentiste de formation, le président sortant (LR) de la région Grand Est, Jean Rottner, aborde les régionales avec une stature renforcée au sortir de la crise sanitaire, qui l’a « profondément marqué ».

« Je suis avant tout un médecin, un médecin qui, par les hasards de la vie, a fait de la politique », assure à l’AFP celui qui a exercé aux urgences de Mulhouse (Haut-Rhin) pendant plus de 10 ans, avant de remiser la blouse blanche en 2008 pour se consacrer à ses activités d’élu.

« Très attaché » à son ancien service, le docteur Rottner, 54 ans, est revenu lui prêter main forte en 2019, quand l’hôpital traversait une crise interne, puis en 2020, quand la ville est devenue l’un des premiers clusters français de Covid-19.

« Je ne me leurre pas, quand il a fait ça, il a pensé aussi à l’image que ça renvoyait de lui », convient Marc Noizet, l’actuel chef du service. « Mais il est venu effectuer un travail, pas faire semblant, serrer des mains et repartir », atteste-t-il, reconnaissant.

Observateur privilégié de la crise, le président de région s’est rapidement mué en lanceur d’alerte, prévenant l’Élysée de la tension hospitalière, se démenant pour récupérer des masques et des tests ou lançant un fonds de soutien aux entreprises, bien avant le plan de relance national.

« Le coronavirus lui a permis de combler un déficit de notoriété, c’est évident », analyse Sébastien Michon, sociologue et directeur de recherche au CNRS, à Strasbourg. « C’est aussi lié à son parcours personnel: urgentiste de profession, il était légitime pour prendre la parole ».

« J’ai fréquenté la mort pendant ma vie professionnelle, mais jamais autant que pendant cette crise », confie l’ex-patron du Samu. « Donc j’estime que c’était mon devoir d’élever la voix », comme en janvier, lorsqu’il dénonce le « scandale d’État » de la lenteur de la campagne vaccinale.

– Combine et stratégie –

C’est en 2001 qu’il se lance et devient conseiller municipal d’opposition à Mulhouse, ville dirigée par le socialiste Jean-Marie Bockel.

En 2007, l’élection de Nicolas Sarkozy constitue un tremplin: le nouveau président fait entrer Bockel au gouvernement au nom de « l’ouverture ». Renvoi d’ascenseur en 2008, Bockel intègre Rottner à sa liste pour les municipales puis lui cède son fauteuil de maire en 2010.

Une « combine » dénoncée par l’ex-député (LR) de Mulhouse (2002-2017) Arlette Grosskost, qui lui fait dire que Jean Rottner, son ancien suppléant, « n’a pas de colonne vertébrale ». « Il ne serait jamais allé seul face aux électeurs », estime cette chiraquienne qui voulait battre Bockel « dans les urnes ».

Rebelote en 2017, au Conseil régional: quand le président (LR) Philippe Richert démissionne pour qu’une nouvelle équipe « se fasse connaître », Jean Rottner obtient le soutien de son groupe face à Valérie Debord, porte-parole nationale des Républicains, et décroche la timbale.

En 20 ans de carrière politique, c’est donc seulement la deuxième fois qu’il aborde une élection en tant que tête de liste, après les municipales de 2014 à Mulhouse, où il était déjà maire sortant.

« C’est un bon stratège », résume Sébastien Michon. « C’est quelqu’un qui sait bien se placer, se positionner ».

– « Centrisme alsacien » –

Son positionnement idéologique, par contre, lui vaut encore de farouches inimitiés. Dans une région dont la cohérence demeure régulièrement débattue, certains ne pardonnent pas à cet ancien défenseur fervent de l’Alsace d’être devenu la figure de proue du Grand Est.

« Je m’étonne franchement qu’on puisse comme ça changer de position. Il l’a fait, il a sa conscience pour lui », peste le sénateur apparenté au groupe LR André Reichardt, ancien président du Conseil régional d’Alsace (2009-2010), qui lui reproche une « volonté d’uniformiser les territoires ».

Jean Rottner lui, se revendique de la tradition du « centrisme alsacien ». Ami de François Baroin, il se dit proche de Renaud Muselier, le président (LR) de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, ou de la socialiste Carole Delga (Occitanie), et reconnaît des « désaccords avec Laurent Wauquiez » (LR, Auvergne-Rhône-Alpes).

Un temps considéré comme « Macron-compatible », il assure ne pas nourrir d’ambitions nationales. « J’aime le travail que je fais. Quand je vois certains ministres, je me questionne sur leur degré de liberté », explique-t-il, mais sans fermer totalement la porte. « Si un jour le téléphone sonne, ce sera une sorte de reconnaissance… ».

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