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Algues vertes: une bande dessinée jette un pavé dans la mare

Fruit de trois ans d’enquête sur le terrain, la bande dessinée « Algues vertes l’histoire interdite » d’Inès Léraud et Pierre Van Hove, parue en juin chez Delcourt, jette une lumière crue sur « un demi siècle de fabrique du silence », selon l’auteure, interrogée par l’AFP.

Spécialiste des enquêtes mêlant environnement et santé, Inès Léraud, journaliste à Radio France et membre du média Disclose, s’est installée dans le hameau de Coat-Maël (Côtes-d’Armor) en 2015 pour enquêter.

« Le fait de vivre sur place dissipait la méfiance, j’atteignais ainsi des témoins que je n’aurais jamais pu connaître en vivant à Paris », raconte-t-elle dans son enquête fleuve.

S’appuyant autant sur des témoignages de lanceurs d’alerte (médecins, chercheurs), des documents officiels, coupures de presse, que sur des lettres des services de l’État, d’élus ou de particuliers, l’auteure retrace l’histoire des marées vertes depuis leur origine après-guerre jusqu’à aujourd’hui.

Et s’aperçoit, ce faisant, que documenter l’histoire de ce phénomène revient à « raconter celle de l’agriculture bretonne ». De la mort d’un cheval intoxiqué par des algues en décomposition en 2009 jusqu’à celle d’un joggeur en 2016, près de Saint-Brieuc, « enterré sans qu’aucune analyse, pas même un prélèvement sanguin, ne soit diligentée par le parquet », Inès Léraud tire le fil d’une histoire qui se révèle de plus en plus politique.

« On entend encore aujourd’hui dans le milieu agricole ce discours qui dit que le lien entre agriculture et marées vertes n’est pas prouvé, et quand je suis venue m’installer en Centre-Bretagne, la plupart des gens me disaient que les algues n’avaient jamais tué », explique Inès Léraud.

« Comme dans les grands scandales sanitaires, un travail de désinformation a été fait sur le sujet des algues vertes, des travaux scientifiques ont été mis de côté, des contre discours sont arrivés du monde industriel, couverts par le monde politique », affirme la journaliste.

Après ses trois années d’enquête, elle se dit aujourd’hui « choquée par un système un peu orwellien où le blanc devient noir et inversement ».

« Ceux qui essaient de mettre en lumière ce problème, comme le médecin urgentiste de Lannion ou les scientifiques de l’Ifremer, sont considérés comme des ennemis par les industriels et l’administration bretonne », constate Inès Léraud.

Paradoxe, selon l’auteure, qui enquête d’habitude sur des phénomènes « plus complexes ou cachés, comme l’amiante ou les pesticides », les algues vertes sont « sous nos yeux alors qu’on nous a dit que ça n’existait pas ou que ce n’était pas ce qu’on croyait ».

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