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« Vous n’êtes pas censé connaître la loi ? »

« Vous n’êtes pas censé connaître la loi ? » Au procès de Pierre Botton, soupçonné d’avoir détourné une partie de l’argent de son association, le tribunal a interrogé mardi l’ex-homme d’affaires sur le flou qui existait entre dépenses professionnelles et personnelles.

Pensions alimentaires, loyers et travaux dans une villa à Cannes, indemnités kilométriques, voyages, restauration, esthétique… le président Benjamin Blanchet énumère, laconiquement, une série de dépenses tirées des comptes de la société de M. Botton.

Pour l’accusation, M. Botton a détourné, par le biais de cette société, entre « 54 et 61% » du total des dons réalisés au bénéfice de l’association « Ensemble contre la récidive », qu’il a fondée après avoir passé 20 mois en prison dans les années 1990.

Dans les comptes de cette société, baptisée « Au centre des projets », il aurait fait passer, entre 2013 et 2017, plusieurs centaines de milliers d’euros de dépenses personnelles pour des dépenses professionnelles, selon le parquet.

« En quoi cette société doit payer les pensions alimentaires que vous devez à titre personnel ? » commence le président du tribunal.

M. Botton explique avoir emprunté de l’argent à un investisseur suisse qui était aussi un ami. « Il a été convenu qu’il mette de l’argent au compte courant de la société et que je puisse utiliser cet argent à des fins personnelles », dit-il.

« Vous avez une condamnation, celle de la cour d’appel de Lyon en 1996, notamment pour abus de bien sociaux… Vous savez ce que c’est », s’étonne le magistrat, sceptique. « Ca ne fait pas tilt ? »

« Ca fait tilt », acquiesce M. Botton. « J’ai demandé aux experts-comptables: +est-ce que vous êtes sûrs que c’est bien la bonne méthode ?+ », poursuit-il, affirmant avoir « fait confiance » à des gens qui étaient pour lui « des autorités ».

« A aucun moment, compte tenu de ce qui est s’est passé dans ma vie, je ne peux faire passer sur la société un voyage en Thaïlande. Je ne suis pas fou ! », s’emporte-t-il.

– « Légalité » –

En 1996, M. Botton a été condamné dans le cadre d’une affaire politico-financière impliquant celui qui était alors son beau-père, Michel Noir, ancien ministre RPR et maire de Lyon.

A sa sortie de prison, il a décidé de s’engager pour améliorer les conditions de détention et lutter contre la récidive. Il a mené une série d’actions à travers son association, en lien avec les pouvoirs publics et en récoltant des financements auprès de grandes entreprises.

Après une enquête préliminaire ouverte en 2017, il a cependant été renvoyé devant la justice, notamment pour « abus de confiance », « abus de biens sociaux » et « escroquerie ».

Le président du tribunal poursuit sur les frais: les loyers et travaux liés à une villa de Cannes pour 108.500 euros ? Il l’utilisait pour des déplacements professionnels, justifie M. Botton. Les dépenses liées à son logement personnel pour 90.400 euros ? C’était aussi le siège social de sa société, dit-il.

Des frais liés à une activité de photographie baptisée « O2B », pour 169.000 euros ? M. Botton explique longuement, parfois confusément, s’être pris de passion pour la photographie d’art, mais souligne aussi qu’il a réalisé des photos commerciales, destinée à l’agencement de pharmacies – l’activité initiale de sa société.

« Il y avait un message de base: il faut que tout soit fait dans la légalité », insiste-t-il. « Jamais vous ne me verrez aller contre la décision d’un commissaire aux comptes, d’un expert comptable ! » lance-t-il.

Le procureur, Julien Goldszlagier, insiste: « J’ai cru comprendre que vous avez été condamné pour abus de bien social et que vous en avez tiré un certain nombre de conséquences ». « Vous n’êtes pas censé connaître la loi, M. Botton ? »

« Tout le monde est censé connaître la loi », répond le prévenu, contestant avoir voulu réaliser des « montages » financiers.

Pas moins de « trois contrôles fiscaux » ont été réalisés depuis 2007 sur les comptes de cette société, souligne l’avocat de M. Botton, Me Jérôme-Marc Bertrand.

« Quel a été l’avis du contrôleur fiscal en 2010, 2012 et 2016 ? », demande le conseil. « Aucun contrôle ne m’a alerté sur le fait que ce n’était pas légal », répond le prévenu.

En fin d’après-midi, après la lecture d’un procès-verbal, M. Botton s’effondre en larmes, n’arrive plus à s’exprimer. L’audience est suspendue jusqu’à mercredi.

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