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Face au coronavirus, Macron change de ton et appelle à « l’union sacrée »

Face à « la plus grave crise sanitaire depuis un siècle », Emmanuel Macron a endossé les habits de « père de la Nation » pour faire accepter aux Français des mesures drastiques contre le coronavirus.

« La France unie, c’est notre meilleur atout dans la période troublée que nous traversons », a affirmé jeudi le chef de l’État au cours d’une longue déclaration de 25 minutes depuis son bureau de l’Élysée.

« Je compte sur vous », a-t-il déclaré à plusieurs reprises en s’adressant aux Français. En les appelant à penser en « solidaire » plutôt qu’en « solitaire », à privilégier le « nous » au « je ». Bref, a-t-il résumé, « le temps aujourd’hui est à la cohésion de la Nation ».

Emmanuel Macron « a tenu un discours très solennel, qui souligne la gravité de la situation », estime Jérôme Fourquet, directeur opinion et stratégie de l’Ifop. « C’est quasiment un discours de mobilisation patriotique lors du déclenchement d’un conflit, sauf qu’on a remplacé les +soldats, marins et aviateurs+ par les +blouses blanches+, en affirmant qu’ils auront le soutien de la Nation ».

Dans un tel contexte, « on ne peut pas faire autrement que de faire corps avec le président », souligne le politologue Philippe Moreau-Chevrolet. « Il n’a oublié personne, a parlé à toutes les catégories, et c’est peut-être le début d’une forme de réconciliation avec les Français » pour ce président majoritairement impopulaire dans les sondages, selon lui.

– « Dramatisation » –

Pour Dominique Wolton, spécialiste en communication politique au CNRS, la « dramatisation » du discours du président est « un pari qui pourrait lui être favorable s’il est gagné ». Mais il lui faut pour cela que les résultats suivent, prévient-il.

Les premières réactions de l’opposition ont été plutôt positives. Le patron des députés LR Damien Abad a trouvé Emmanuel Macron « à la hauteur de sa fonction » tandis que Jean-Luc Mélenchon en appelait à la « solidarité et la cohésion ».

Pour préparer cette intervention très attendue, sa première solennelle depuis le début de la crise, Emmanuel Macron est resté enfermé toute la journée à l’Élysée, où il a beaucoup consulté. Il a échangé avec le Premier ministre Édouard Philippe, le ministre de la Santé Olivier Véran et le directeur général de la Santé Jérôme Salomon, ces deux derniers s’étant imposés comme les deux visages de la lutte contre l’épidémie aux yeux des Français.

Le chef de l’État a également discuté avec des responsables politiques d’un possible report des élections municipales, dont le premier tour se déroule dimanche. Mais cette éventualité a été repoussée par ses interlocuteurs, dont le président LR du Sénat Gérard Larcher, selon des sources parlementaires.

– « Inflexions étonnantes » –

Plusieurs analystes soulignent cependant les contradictions entre les mesures les plus drastiques, à savoir la fermeture des crèches, des écoles et des universités, ou l’appel aux plus de 70 ans à ne pas sortir, et, d’un autre côté, le maintien des élections municipales dimanche et le 22 mars.

Ce « paradoxe » est « très illustratif du +en même temps+ » cher à Emmanuel Macron, souligne Sylvain Brouard, directeur de recherche au Cevipof. Car il est difficile de comprendre que « en même temps, on peut voter mais qu’on ne va pas à l’école et que, lorsqu’on a plus de 70 ans, on doit rester chez soi ».

Cet expert pointe aussi des « inflexions étonnantes » et « un peu décalées par rapport à de nombreuses prises de position et de réformes engagées », lorsque le chef de l’État critique les « lois du marché ».

« Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner notre cadre de vie, au fond, à d’autres est une folie. Nous devons en reprendre le contrôle, construire plus encore que nous ne le faisons déjà une France et une Europe souveraines », a-t-il déclaré.

Emmanuel Macron s’est d’ailleurs placé en leader d’une coordination européenne, réclamant que l’UE agisse « fort et vite ». Il n’a pas hésité à critiquer la faiblesse des mesures annoncées par la Banque centrale européenne, l’appelant à en « prendre de nouvelles ».

« Il est dans le registre de Nicolas Sarkozy pendant la crise de 2008, avec la volonté de prendre un leadership au niveau international, au minimum européen », « quoi qu’il en coûte », c’est-à-dire en oubliant les critères de Maastricht », estime Jérôme Fourquet. Et, de ce fait, « il sera aussi évalué sur sa capacité à gérer le niveau européen », prévient Philippe Moreau-Chevrolet.

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