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L’armée française officialise l’espace comme terrain stratégique

Et maintenant, l’espace. L’armée française a ajouté vendredi à ses attributions fondamentales un nouveau terrain d’opération, plus vaste que tous les autres réunis, et objet de fortes convoitises internationales.

L’état-major de l’armée de l’air est devenu état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace, un vocable qui désigne rien moins qu’une nouvelle frontière.

« Au coeur des rêves mais aussi des convoitises, l’espace de ne doit pas devenir le théâtre de luttes sauvages », a déclaré la ministre des Armées Florence Parly lors d’un discours sur la base de Salon-de-Provence (sud-est). « Espionnage, sabotage, pollution: les menaces sont tangibles. Face à ce nouvel ordre des choses, nous devons être prêts ».

Dans un entretien avec le quotidien La Provence, la ministre avait auparavant évoqué le « passage d’une vision d’un espace +bien commun+, au service de la science, à un espace dans lequel les puissances continuent de se disputer la suprématie mondiale ».

Les développements des derniers jours le confirment: la Chine a lancé jeudi une sonde pour Mars, les Emirats arabes unis ont propulsé lundi la leur baptisée Espoir, pour la première mission spatiale arabe, et les Etats-Unis en lanceront une aussi, nommée Mars 2020, le 30 juillet.

Mais les ambitions ne se limitent pas à l’exploration. En mars 2019, L’Inde a rejoint le club très fermé des nations capables d’abattre par un tir de missile un satellite dans l’espace.

Jeudi, le Commandement spatial américain a affirmé avoir « des preuves » que Moscou avait « conduit un test non-destructeur d’une arme anti-satellite depuis l’espace » le 15 juillet. « Propagande », a rétorqué Moscou, qui affirme que les tests n’étaient pas menaçants et « n’avaient pas violé » le droit international.

L’incident en rappelle pourtant un autre, survenu en 2017, au cours duquel le « satellite-espion » russe Louch-Olympe avait tenté de s’approcher du satellite militaire franco-italien Athena-Fidus.

Depuis, Paris a réagi. « Nous ne sommes en aucun cas engagés dans une course aux armements », affirme Mme Parly dans son interview. Mais tout en réaffirmant l’attachement de la France à un « usage pacifique de l’espace », elle juge indispensable d’identifier parfaitement « les menaces auxquelles notre pays est potentiellement confronté ».

La France va donc s’équiper en satellites patrouilleurs capables de « détecter, caractériser et attribuer à leurs auteurs ce type de manœuvres inamicales ». Elle se dotera de caméras à 360 degrés et de « lasers de puissance » pour tenir à distance ou éblouir « ceux qui tenteraient de s’approcher trop près ». L’an passé, une source gouvernementale avait aussi fait état à l’AFP de « mitrailleuses à même de casser les panneaux solaires d’un satellite à l’approche ».

– De la compétition à l’affrontement –

« On est en train de changer de monde en matière spatiale », dit-on au cabinet de Mme Parly. « L’espace est, de plus en plus, un domaine de compétition, un domaine contesté et potentiellement un domaine d’affrontements ».

Une loi, que le ministère espère faire adopter d’ici début 2021, intègrera juridiquement la nouvelle appellation. Mais il n’était plus question d’attendre.

Basé à Toulouse, le grand commandement de l’espace comprendra un effectif de 200 personnes au départ, 500 en 2025. Le sujet va monter en puissance dans les écoles militaires. Et les investissements du secteur passeront de 3,6 milliards d’euros, prévus initialement dans la loi de programmation militaire (2019-2025) à 4,3 milliards.

Avec ses deux milliards d’euros d’investissements annuels dans le spatial militaire et civil, l’Hexagone reste cependant loin du trio de tête: 50 milliards pour les Etats-Unis, 10 pour la Chine et 4 pour la Russie, selon des chiffres du gouvernement français.

Mais si pour l’heure, Paris s’interdit d’attaquer dans l’espace et de frapper sur terre depuis le cosmos, Mme Parly revendique le droit d’y « développer des moyens d’autodéfense ».

La suite reste à inventer. Les hautes instances militaires anticipent un avenir troublé. « L’espace étant à la fois un enjeu économique majeur et un milieu essentiel à la supériorité militaire, la compétition devient confrontation », constatait début 2019 le général Michel Friedling, à la tête du commandement interarmées de l’Espace.

« Tout conflit de haute intensité, impliquant une puissance dotée de capacités spatiales de premier rang, s’étendra inéluctablement à l’espace ».

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