in

Pierre Bénichou, pilier de l’Obs et chroniqueur truculent

Les hommages ont afflué mardi après l’annonce du décès à 82 ans de Pierre Bénichou, journaliste qui avait occupé de hautes fonctions au Nouvel Obs, avant de se faire connaître du grand public comme chroniqueur au verbe truculent dans des émissions populaires comme « les Grosses têtes ».

Pierre Bénichou est décédé dans la nuit de lundi à mardi, « dans son sommeil » et à son domicile, a annoncé son fils Antoine à l’AFP, précisant que sa mort n’était pas liée au coronavirus.

De nombreux personnalités lui ont rendu de vibrants hommages. « Pierre Bénichou s’est éteint, emportant avec lui son verbe truculent et ses éclats de rire », a salué le président Emmanuel Macron dans un communiqué, estimant qu' »il était tout à la fois un drôle de journaliste et un journaliste drôle », à la « plume étincelante », autant qu’une « vedette du transistor ».

« L’homme qui m’aura fait le plus rire depuis vingt ans est parti. Une grande plume aussi », a salué Laurent Ruquier, l’animateur des « Grosses têtes », tandis que le patron de RTL, Régis Ravanas, le remerciait « de nous avoir tant fait rire durant toutes ces années ».

Sa disparition « accable tous ceux qui ont aimé son esprit, sa culture insondable, la grande intelligence qu’il dissimulait derrière le rire, son culte de l’amitié », a estimé le journaliste Philippe Labro.

Un mois après la disparition du fondateur du Nouvel Obs, Jean Daniel, qui l’avait recruté, « c’est une génération qui nous quitte », a commenté à l’AFP Dominique Nora, la directrice de l’hebdomadaire.

Né le 1er mars 1938 à Oran, alors en Algérie française, dans une famille juive séfarade, Pierre Bénichou était le fils d’un professeur de philosophie et le neveu de Georges Dayan, ami et proche collaborateur de François Mitterrand.

Ses parents l’envoient à Paris finir ses études, au lycée Condorcet puis à la Sorbonne. Il n’a pas vingt ans lorsqu’il entre comme stagiaire à France Soir, alors journal à très grand tirage. En 1963, il devient rédacteur en chef adjoint d’Adam, revue dédiée à la mode masculine.

– Une longue carrière au Nouvel Obs –

C’est en 1968 qu’il entre au Nouvel Observateur, d’abord comme rédacteur en chef adjoint, avant d’être nommé rédacteur en chef dix ans plus tard. Il devient directeur adjoint en 1985 puis directeur délégué de 1996 à 2005, avant de se retirer du journal.

Il accède à la célébrité dans les années 1990 comme chroniqueur aux « Grosses têtes » de RTL. Sa gouaille truculente fait mouche et il devient un intervenant apprécié des auditeurs.

Pierre Bénichou rejoint plus tard Laurent Ruquier sur Europe 1, qui l’intègre à sa bande de chroniqueurs dans diverses émissions de télé et de radio. Il retourne ainsi en 2014 dans les « Grosses Têtes » lorsque Ruquier en reprend les commandes.

Il a aussi participé à d’autres programmes comme « Vivement dimanche prochain » de Michel Drucker.

– Un « faiseur de journal » –

Au Nouvel Obs, il écrivait peu et s’était spécialisé dans la rédaction de « portraits souvenirs ». Ces notices nécrologiques, écrites dans l’urgence de la disparition des personnalités mais très travaillées, et toujours d’un style ramassé (« J’ai la mémoire longue mais la plume courte », disait-il), avaient été rassemblées en 2017 dans le livre « Les absents, levez le doigt! »

En préambule, il y confiait des souvenirs de son enfance oranaise, et donnait certaines clefs de « cette petite sieste, cette longue flânerie mélancolique que fut ma vie de journaliste », admettant avoir passé en trente ans au Nouvel Obs « plus de temps à faire écrire les autres qu’à écrire moi-même ».

Bien qu’ayant été longtemps un adepte des nuits parisiennes, Pierre Bénichou, vétéran de chez Castel, contestait cependant la réputation de dilettante que certains lui prêtaient. « J’étais glandeur, mais je travaillais beaucoup ! », avait-il raconté en 2016 sur France Musique, se décrivant comme « beaucoup plus faiseur de journal que journaliste ».

Resté fidèle à ses racines oranaises, il avait toujours cultivé une hostilité marquée à l’encontre du général de Gaulle, et bien que situé politiquement à gauche (il avait soutenu la candidature de François Mitterrand en 1981), sa défense des pieds-noirs l’avait placé parfois en porte-à-faux avec ses différentes rédactions.

Il vouait par ailleurs une grande passion à la poésie et la chanson française et s’était lancé au théâtre en 2004 dans une pièce de Laurent Ruquier.

Marié en 1970 à Alix Dufaure, journaliste à Marie Claire décédée en 2012, avec qui il avait eu un enfant, Antoine, Pierre Bénichou était aussi le beau-père de l’acteur Vincent Lindon, né d’une première union de son épouse et qu’il considérait également comme son fils.

Le journaliste, issu d’une famille non pratiquante, confessait ne croire « ni à Dieu ni à Diable, pas plus qu’aux +forces de l’esprit+ » chères à Mitterrand.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

GIPHY App Key not set. Please check settings

    Un organisme de bienfaisance anti-gay gère un hôpital sous tente pour le coronavirus à Central Park

    Chasse à l’homme en Inde après qu’un rassemblement religieux soit devenu un point de contamination du Covid-19