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Manifestations au Zimbabwe: l’écrivaine Tsitsi Dangarembga arrêtée

En lice pour le prestigieux prix littéraire britannique Booker Prize, l’écrivaine zimbabwéenne Tsitsi Dangarembga a été arrêtée vendredi à Harare pendant une manifestation anti-corruption, interdite par les autorités.

A 61 ans, munie de pancartes, celle qui est retournée dans son pays après des études en Angleterre manifestait à Borrowdale, un quartier chic de la capitale zimbabwéenne.

Réclamant notamment la libération d’un journaliste qui avait appelé à manifester, Mme Dangarembga a été embarquée dans un camion de police avec un autre manifestant, a constaté un photographe de l’AFP.

« Arrêtée! A Borrowdale. Espère que ça ira », a-t-elle twitté peu après son arrestation.

Quelques minutes avant d’être interpellée, elle avait confié à l’AFP être surprise de l’ampleur de la mobilisation policière. « Ils ont déclaré que cette manifestation était illégale. Je ne vois pas bien pourquoi. Notre Constitution donne aux Zimbabwéens le droit de manifester pacifiquement, et c’est ce que nous faisons ».

La police a confirmé son arrestation dans un communiqué, expliquant qu’elle était accusée « d’inciter à participer à des manifestations interdites et de brandir des pancartes aux slogans politiques destinés à provoquer des désordres publics ».

L’ambassadrice britannique à Harare, Melanie Robinson, s’est déclarée « très inquiète par les informations faisant état d’arrestations, d’enlèvements et de menaces visant ceux qui veulent exercer leurs droits prévus par la Constitution », dans un message sur Twitter. « La liberté d’expression est vitale même en période de Covid-19, à condition que la distanciation sociale soit appliquée ».

– Capitale en état de siège –

Quelques jours avant son arrestation, son livre This Mournable Body, dernier d’une trilogie, a été sélectionné pour le Booker Prize en Angleterre.

Saluée comme une voix féministe, Mme Dangarembga est devenue célèbre en 1988 avec « Nervous Conditions » (« A fleur de peau » dans la version française), puis une suite intitulée « The Book of Not », qui racontent le parcours d’une jeune fille au Zimbabwe.

Vendredi, les rues de la capitale zimbabwéenne étaient quasi désertes, la police et l’armée, sur le pied de guerre depuis la veille, menaient des contrôles aux quatre coins de la ville.

Jeudi, les autorités avaient rappelé l’interdiction de ces manifestations anti-gouvernementales et averti que les forces de sécurité « en alerte », n’hésiteraient pas à intervenir.

Après cet avertissement, la plupart des habitants d’Harare sont restés chez eux. Dans le quartier d’affaires, des policiers en tenue anti-émeute étaient présents quasiment à chaque carrefour, a constaté un journaliste de l’AFP.

Seuls quelques manifestants dans certaines banlieues ont osé descendre dans la rue.

A la tête de la petite formation Transformer le Zimbabwe, l’opposant Jacob Ngarivhume avait appelé à manifester vendredi, tout comme le journaliste et lanceur d’alerte Hopewell Chin’ono, pour protester contre la corruption et la crise économique dans le pays. Tous deux ont été arrêtés, accusés d’incitation publique à la violence.

– Insécurité alimentaire –

D’autres arrestations ont eu lieu vendredi, dont celle de l’avocate et porte-parole du Mouvement pour le changement démocratique (MDC, principal parti d’opposition) Fadzayi Mahere.

Sur Facebook, elle a retransmis en direct des images de son arrestation. On y voit des policiers escalader les barrières métalliques d’un restaurant où elle s’était arrêtée après avoir manifester, pour venir l’arrêter.

Le gouvernement a intensifié la répression. Le porte-parole de la Zanu-PF au pouvoir, Patrick Chinamasa a récemment qualifié l’ambassadeur américain Brian Nicholls de « voyou », l’accusant d’avoir fomenté ces manifestations anticorruption.

Successeur de Robert Mugabe à la tête du pays après un coup d’Etat en novembre 2017, le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa avait promis de relancer une économie moribonde.

Mais certains estiment que la situation est pire encore que sous l’ère Mugabe.

Le Zimbabwe, pays d’Afrique australe, est englué depuis une vingtaine d’années dans une crise économique catastrophique, qui se traduit par une inflation galopante et des pénuries de nombreux produits de première nécessité.

Selon le Programme alimentaire (PAM) des Nations unies, environ 60% de la population zimbabwéenne, soit 8,6 millions de personnes, vont se retrouver en situation d’insécurité alimentaire d’ici la fin de l’année, en raison « des effets combinés de la sécheresse, de la récession économique et de la pandémie » de Covid-19.

A ce jour, plus de 3.000 cas de nouveau coronavirus ont été enregistrés dans le pays, dont 53 décès.

fj-pho-str-sn-cld/thm

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