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le système de santé périclite et le coronavirus fait rage

Les images bouleversantes ont suscité l’indignation au Zimbabwe: sept nourrissons morts-nés, enveloppés dans tissus verts sur un rayonnage d’hôpital. La conséquence dramatique d’un système de santé à l’abandon, sur lequel la crise du Covid-19 est venu peser un peu plus.

La nuit de fin juillet durant laquelle ces sept bébés sont morts-nés à l’Hôpital public d’Harare, huit femmes y ont accouché. Un seul enfant a donc survécu, a raconté sur Twitter le Dr Peter Magombeyi qui a publié l’image-choc.

Selon des médecins, cet incident n’est que la pointe émergée de l’iceberg que représente l’état dramatique du secteur public de santé, au bord de l’effondrement en raison de pénuries de médicaments et d’équipements de base et d’un personnel en sous-effectif et sous-payé.

« La situation est extrêmement préoccupante », affirme à l’AFP le patron de l’Association des Médecins hospitaliers du Zimbabwe, Norman Matara: « Un médecin courageux a seulement réussi à prendre cette photo, mais il s’agit d’un très petit nombre, si l’on regarde ce qu’il se passe dans les autres hôpitaux ».

Selon les experts, les racines de la crise du secteur de santé plongent dans l’effondrement économique plus large du pays: l’hyperinflation est de retour, les usines ferment, le taux de chômage officiel explose à environ 90% et la majorité de la population s’enfonce de plus en plus dans la pauvreté, peinant désormais à se payer un vrai repas.

Pour les médecins de nombreuses naissances sans vie sont dues aux difficultés d’accès aux soins que rencontrent les femmes enceintes.

La pandémie de Covid-19 a encore agrafé la situation. Les infirmières sont en grève perlée dans l’ensemble du pays depuis des mois et revendiquent des hausses de salaire et des équipements de protection contre le nouveau coronavirus. Médecins et internes ont rejoint le mouvement.

– « Sens de la responsabilité » –

Et les employés au travail dans les hôpitaux publics, qui accueillent la grande majorité des Zimbabwéens, sont débordés.

Pour l’heure le chef de l’Etat a dit comprendre les griefs du personnel médical mais s’est contenté de les appeler à reprendre pleinement le travail face à la propagation rapide de l’épidémie.

« J’appelle notre personnel médical à agir dans l’intérêt national et à montrer un sens de la responsabilité », a déclaré le président Emmerson Mnangagwa en prononçant vendredi l’éloge funèbre de son ministre de l’Agriculture, Perrance Shiri, décédé du Covid-19.

« Vos doléances, que nous reconnaissons et dont nous continuons à nous occuper, ne peuvent être défendues au dépens de vies humaines », a-t-il ajouté, « quand la pandémie se propage et que le bilan humain augmente, personne n’est gagnant, personne. Nous mourons tous ».

Samedi soir, le pays a recensé 490 nouveaux cas de Covid-19 en 24 heures, le chiffre le plus haut depuis l’apparition du nouveau coronavirus au Zimbabwe et le nombre de décès – 69 – a doublé en 10 jours.

« Nous n’avons pas d’équipements de protection et tout ce que le gouvernement fait, c’est des promesses », s’insurge Norman Matara. « Il n’y a pas de médicaments dans les hôpitaux, c’est difficile de faire notre travail ».

Selon lui, 15% des infections au Covid-19 enregistrées dans le pays concernent des membres du personnel soignant.

– « Manque de sérieux politique » –

« Cela montre que nous courons un risque important d’être infectés et on ne peut donc pas continuer à travailler sans vêtements de protection », souligne-t-il.

Les infirmières ont promis de ne pas faire machine arrière tant que leurs revendications ne seront pas satisfaites. « Des infirmiers et infirmières sont contaminées tous les jours », souligne le président d’un syndicat de personnel infirmier, Simbarashe Tafirenyika.

« Nous sommes contraints de porter des masques N95 durant sept jours et les masques chirurgicaux pendant trois jours, alors que nous sommes censés les jeter (ces deux types de masques, ndlr) après une seule utilisation », explique-t-il. « Nous ne pouvons pas continuer à mourir » et il faut « protéger nos familles ».

Le pays n’a plus de véritable ministre de la Santé depuis près d’un mois et le limogeage le 7 juillet d’Obadiah Moyo, inculpé de corruption et accusé d’avoir illégalement attribué un contrat de 20 millions de dollars pour la fourniture de tests du Covid-19 et d’équipement de protection.

La plupart des hôpitaux n’ont plus de responsables administratifs, limogés en masse après des soupçons de corruption dans l’approvisionnement en équipements de protection contre le coronavirus.

« Il manque le nécessaire sérieux politique pour résoudre les défis actuels en matière de santé », estime Itai Rusike, directeur du Groupe de travail communautaire sur la Santé (CWGH), un réseau d’organisations citoyennes et communautaires.

« Sans un réel ministre de la Santé (…) le ministère de la Santé opère en pilote automatique », estime-t-il.

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